TOME 5 - FASCICULE 6 - JUILLET 1993

Sommaire

Emile COENEN - La Forteresse "ILE MONSIN"

Joseph THONUS - Regard sur l'histoire de l'ARTILLERIE 1/4

Gilbert SPOIDEN- Monuments à la mémoire du Bataillon COREE

Gilbert SPOIDEN- Le Commando d'ARTHUR

Epinglé pour vous

Courrier des lecteurs

Pierre BEAUJEAN- Les Projecteurs du Génie en 1914-1918

La Citadelle de LIEGE : photos

Emile COENEN - La Forteresse "ILE MONSIN"

LA DEFENSE DE LA MEUSE
Les abris MeMo 1 et MeMo 1 bis.
Bien que la défense de l'île Monsin ne soit basée que sur l'aménagement d'abris dans les culées des futurs ponts, un abri est projeté à la pointe amont de l'île, dès 1931, lors de la première étude réalisée. Jusqu'en 1935, cet abri est repris sous la dénomination "abri du polygone". Il sera situé dans un terrain appartenant à la Défense Nationale, qui érigera à cet endroit un polygone de pontage pour le 3e Génie. L'abri est de dimension réduite (6,50 m x 4,30 m) et comporte une seule embrasure. I1 est construit vers la fin de l'année 1935 et son camouflage présente l'aspect extérieur de deux latrines installées près du polygone.
Plan de l'abri du polygone
En janvier 1938, on décide d'élever un monument en l'honneur du Roi Albert, dont le canal Liège-Anvers porte maintenant le nom. Ce monument est projeté à l'entrée du canal, donc à la pointe ouest de l'île, où se trouve le polygone.
L'architecte MOUTSCHEN (1) dessine les plans du futur mémorial. Il s'agit d'une tour, haute de 40 m, au sommet de laquelle un phare signalera l'entrée du canal. Contre la tour, sera accolée une imposante statue du Roi Chevalier.

(1) L'architecte MOUTSCHEP J deviendra directeur de l'Académie des Beaux-Arts et a notamment fait partie du jury du concours organisé pour la réalisation de la Maison du port (à côté du Musée Curtius).

A l'arrière, s'étendra une esplanade avec des bahuts (murs bas) latéraux et des allées de verdure menant à un mur où sera représenté le tracé du canal.
Au point de vue de la défense, l'édification du mémorial réduit sensiblement l'action des Mi du flanc amont de l'abri du pont Marexhe, et il entraîne aussi la disparition de l'abri du polygone qui assurait la protection du plan d'eau du fleuve en direction du pont barrage.
De plus, l'apparition d'une tour de 40 m représente un repère que l'on a intérêt à renverser au début des hostilités, sauf si elle peut servir, il est vrai comme observatoire à nos troupes. De toutes façons, l'ennemi tentera de l'abattre par son feu d'artillerie.
A la suite d'assez longues tractations avec l'architecte, la 3e DGnF réalise un avant-projet d'abris à installer dans un des bahuts du monument et dans le socle de béton supportant la tour et qui seront reliés entre eux par une galerie. Un dispositif de destruction sera mis au point pour la tour.
Entre-temps, l'EMGA décide de ramener la distance entre deux abris, de 1.660 à 300 m., pour la défense du canal dans le Limbourg. Suite à cette décision, on envisage de construire un abri entre le pont de Coronmeuse et le monument puisque la distance qui les sépare est de 1.250 m.
Une nouvelle étude de l'ensemble est entreprise et il ressort que : vu qu'une exposition est prévue en 1939, il faut différer l'exécution de cet abri jusqu'à la fin de celle-ci. De plus, le projet d'aménagement des abris prévus dans le monument n'est pas encore adopté. Aussi, il faudra doubler les embrasures des flancs de tir des abris MeMo 3 et 3bis, qui seront construits en aval du pont barrage.
Le 16 avril 1938, le Lt Gen Van Den Bergen marque son accord pour le remplacement de l'abri du polygone par les deux abris, dont il a reçu le dernier avant-projet, qui seront aménagés dans le mémorial. Par contre, il refuse la construction de l'abri supplémentaire entre le pont de Coronmeuse et la pointe ouest de l'île; il rejette également l'idée de doubler les embrasures des futurs abris MeMo 3 et 3bis. Il estime que la défense de 1a Meuse, à l'intérieur de PFL 2, ne peut pas être comparée à celle du canal Albert dans le Limbourg.
En ce qui concerne la tour du monument, elle doit être effectivement détruite, mais il est impératif d'empêcher qu'elle ne tombe mal, soit en obstruant la canal, soit en détériorant les abris ou en encombrant leurs champs de tir. Pour cela, il faut prévoir des fourneaux de mine disposés de façon à n'abattre que la partie supérieure et que cette partie tombe en arrière suivant l'axe du monument.
Les travaux débutent en septembre 1938 par la pose de 600 pieux de fondation en avant de la pointe de l'île, et qui serviront de base pour le futur mémorial dont les plans définitifs ne sont pas encore dressés. Durant la période s'étendant d'avril à novembre 1938, des changements successifs dans la conception du mémorial entraînent de nombreuses tractations entre l'architecte et la 3e DGnF. Au début du mois de décembre, le plan final du monument est arrêté et, dès lors, les dessinateurs de la DGnF peuvent enfin dresser les plans définitifs des abris qui prendront les dénominations MeMo 1 et MeMo 1 bis.
Plan d'ensemble de la situation des abris MeMo 1 et 1 bis
Ceux-ci, au nombre de deux, seront indépendants l'un de l'autre, car la galerie les reliant est supprimée. Ils seront totalement intégrés dans le mémorial et seront construits en béton armé. A des fins de camouflage, ils seront recouverts par des minces plaques de même matériau que celles du monument, y compris les embrasures qui seront, en temps de paix, obturées par une maçonnerie légère en briques.
MeMo 1
Ce premier abri est aménagé dans le socle de béton supportant la tour et la statue du Roi. Son accès est situé au centre de la petite esplanade, face à la tour. L'entrée est en puits et -elle est obturée par une plaque type "Elkington". Au pied de ce puits, un couloir de 9 m de long mène à la chambre de tir. Un peu en retrait de celle-ci, un double barrage de poutrelles protège le local et deux petites niches, placées de part et d'autre du couloir, permettent l'entreposage de ces poutrelles. Une porte renforcée donne accès à la chambre de tir qui contient un affût "Chardome" pour tireur assis, ainsi que deux goulottes lance-grenades et l'équipement habituel.
Ce local comporte également une chose peu courante dans un abri : un évier, alimenté en eau courante, est fixé à droite de la porte. Une issue de secours est créée dans la partie droite de l'abri, mais par quel moyen les hommes rejoignaient-ils la terre ferme ?
Le couloir d'accès de l'abri est renforcé par la pose de 5 pieux Franki et, tout le long de ce couloir, court une rigole rejoignant un puisard où une pompe à main permet l'évacuation des eaux d'infiltration ou d'inondation.
Plan de l'abri MeMo 1
Plan en coupe
MeMo 1bis.
Le second abri est implanté dans le bahut de gauche (côté Meuse) flanquant l'esplanade. A des fins de camouflage, une porte portant le sigle A (Albert) est installée dans chacun des bahuts. Celle de droite est fausse tandis que celle de gauche cache la porte grille fermant le sas de l'abri. Après cette porte grille, 5 marches descendent vers la porte à persiennes. La chambre de tir est dotée de l'affût "Chardome" pour tireur assis et de l'équipement standard. Ici aussi, un évier a été installé. Une goulotte lance-grenades assure la défense rapprochée. A l'arrière du local, un petit couloir, fermé par un double barrage de poutrelles, mène à un puits muni d'échelons. Ce puits débouche dans le parterre de fleurs créé au sommet des bahuts. Cette issue de secours était obturée par une dalle "Elkington".
Plan de l'abri MeMo 1 bis
C'est la société anonyme "Béton et Matériaux", mieux connue sous l'appellation "BEMAT", qui entreprend la construction du mémorial en cette fin d'année 1938. La pose de la "tête du Roi", pesant près de 5 tonnes, s'effectue en juillet 1939. Le jour de l'inauguration de l'Exposition Internationale de l'Eau, c'est-à-dire le 20 mai 1939, des échafaudages recouvrent encore le monument et ce n'est que le 5 août 1939 que l'ensemble est inauguré.
La mission dévolue aux deux abris est la suivante : pour MeMo 1, battre le plan d'eau du fleuve en direction de la berge opposée et croiser les feux des Mi aval du pont de Coronmeuse; en ce qui concerne MeMo 1bis, défendre l'accès au pont barrage et battre le plan d'eau en amont de cet ouvrage, mais aussi croiser les feux des Mi de l'abri MeMo 2.
Plan de feux des abris MeMo 1 et 1 bis
Il était prévu de relier ces deux abris au réseau téléphonique enterré par un câble de 4 paires et également d'installer l'éclairage électrique. Bien entendu, cela n'a pas été réalisé.
Lorsque nous avons dressé l'inventaire des archives mises en dépôt au C.L.H.A.M., nous avons trouvé un plan au 1/1000, représentant l'implantation des bâtiments et de l'infrastructure créée pour l'Exposition de l'Eau. Sur ce plan, sont indiqués en rouge, tous les champs de tir des abris du pont de Coronmeuse, de MeMo 1 et 1 bis, de MeMo 2 et du pont Marexhe. Dans cette zone, aucun bâtiment ne pouvait dépasser une certaine hauteur, afin de ne pas créer des angles morts et c'est souvent à ces endroits que sont réalisés des parterres de fleurs ou des allées de verdure.
Revenons à la destruction de la tour. Nous avons vu qu'un dispositif de destruction précis a été imaginé pour cette tour qui gêne l'abri MeA 1 et qui peut être un repère pour l'ennemi. Malgré toutes mes recherches, je n'en ai pas trouvé de trace dans le réseau de destructions. Comme on le sait, elle n'a pas sauté en mai 1940. Les troupes sur place n'ont pas jugé utile de l'abattre. L'histoire nous a appris que cela aurait été inutile. Nous pouvons donc encore admirer cette belle réalisation.
MeMo 2 - Le PONT BARRAGE
La réalisation d'un pont barrage sur la Meuse, à hauteur de Jupille, est adjugée en février 1928.
La Défense Nationale prévoit d'aménager deux abris pour Mi dans la culée de la rive gauche du fleuve.
La construction du pont commence en mai 1928 et la Société Cockerill entame la réalisation de toutes les parties métalliques.
Le 22 septembre de la même année, la Direction des Services Extérieurs des Bâtiments Militaires envoie une note au MDN dans laquelle on définit un peu plus le travail nécessaire pour la réalisation des deux abris prévus. Il est décidé d'aménager, dans la culée de la rive gauche, un abri à deux chambres de tir pour Mi du côté amont. Du côté aval, on envisage de créer une chambre de tir dans la culée et une seconde dans une cabine renfermant la machinerie pour le service des vannes. Ces deux chambres de tir sont réunies par un puits vertical doté d'une échelle et d'une trappe.
Les deux abris du pont seront reliés entre eux par une galerie de communication. Divers autres aménagements sont prévus, notamment la construction de galeries supplémentaires permettant d'accéder aux abris à partir de différents endroits.
Les abris seront protégés par du béton armé d'un mètre d'épaisseur en ce qui concerne le ciel et les parois et de 50 cm d'épaisseur pour le radier.
En tenant compte de ces critères, la 3e DGnF réalise le plan de l'abri MeMo 2 dans le pont barrage, mais celui de l'abri aval n'est qu'un avant-projet car le type de cabine pour le service des vannes n'est pas encore définitivement fixé par les Ponts et Chaussées.
Après de nombreuses recherches dans les archives militaires, j'ai enfin pu découvrir un plan de cet abri MeMo 2. Malheureusement ce plan est très complexe et n'est qu'une ébauche de ce qui devait être réalisé. En effet, après une visite extérieure des lieux, j'ai pu me rendre compte que le plan d'ensemble de l'ouvrage ne correspondait pas avec la réalité. Ceci pourrait provenir du fait que le barrage fut en partie détruit le 11 mai 1940 ou d'une transformation ultérieure de celui-ci.
Donc, pour me faire une idée exacte de ce qui avait été finalement réalisé, je devais impérativement visiter l'abri MeMo 2. Mais on n'entre pas dans le pont barrage comme dans un moulin. Après avoir adressé quantité de lettres aux services s'occupant du pont barrage, qui sont très nombreux, et après avoir fait appel au dévouement de bon nombre de personnes, j'ai enfin obtenu l'autorisation de me rendre sur place.
Ce n'est que ce 24 mars 1993, soit après quatre années d'attente, que j'ai pu visiter les abris, et jusqu'au dernier moment, j'ai craint de ne pas pouvoir vous soumettre le plan définitif de MeMo 2. Ce plan, que vous découvrirez ci-après, est très simplifié mais reflète la réalité.
L'abri MeMo 2 est constitué de deux abris à deux chambres de tir incorporés dans la structure du pont barrage.
Le premier abri, situé en amont du pont, est aménagé dans sa culée. L'entrée s'effectue par la galerie de service du barragiste, qui passe sous le pont routier et donne accès aux vannes et au rez-de-chaussée de la cabine de manoeuvre. Cette galerie se situe à 55 cm au-dessus du niveau de la berge; à l'origine, quatre marches rattrapaient cette différence; actuellement, il s'agit d'une rampe en béton.
A environ 2,50 m de l'entrée de cette galerie, et dans sa paroi gauche, une porte en chêne obture l'accès de l'abri amont. Lors de la réalisation de ces abris, c'est-à-dire, en 1928, les portes grilles et à persiennes habituelles n'étaient qu'au stade de l'ébauche, aussi l'accès des abris à cette époque était-il barré par de lourdes portes en chêne. C'est encore le cas pour l'abri MeMo 2 ainsi que pour celui du pont Atlas V ou pont de Coronmeuse. Un peu en arrière de cette porte, un barrage de poutrelles renforce la fermeture du couloir d'accès, d'une longueur de 2,15 m, qui aboutit dans la première chambre de tir.
Cette chambre de tir, de 2 m x 2 m, est séparée de la seconde par un muret de 1,15 m x 0,90 m. L'équipement est ici tout à fait différent de celui que l'on rencontre habituellement dans les abris construits plus tardivement. L'abri ne comporte pas de crochets porte fusils, porte habits et porte lampes. Le plafond n'est pas pourvu de tôles ondulées galvanisées. La tablette chargeur, placée sur le muret, est de forme identique à celle que l'on connaît mais a des dimensions nettement supérieures (50 cm x 10 cm). Les étagères et leurs supports sont, par contre, déjà du modèle standard. Une étagère de ce type est placée sur la paroi arrière de chaque chambre de tir.
Plan d'ensemble de l'abri MeMo 2
Ici, il n'y a pas non plus de support d'affût "Chardome", car celui-ci sera créé plus tardivement. Afin de permettre aux occupants de stabiliser les pieds des différents affûts de mitrailleuses, un évidement est réalisé sous l'embrasure et un autre à une certaine distance de celle-ci. Une semelle de chêne est placée dans l'évidement de l'embrasure tandis que le second est rempli d'argile. Ce support de Mi se rencontre dans les abris type I.R.
Coupe d'une embrasure et du support de Mi des locaux 1 et 2 du pont barrage
La seconde chambre de tir comporte également une issue de secours. Celle-ci étant obturée à 1 m de profondeur et n'étant pas reprise sur le plan original, je suis incapable de vous dire où elle débouche. On peut simplement supposer qu'elle fait probablement un angle droit afin de déboucher à l'extérieur, à proximité de l'embrasure du local n° 2 (voir plan d'ensemble ci avant).
L'embrasure du local n° 2 a son axe de tir fortement décalé par rapport à l'axe du local, ceci pour permettre un tir pratiquement parallèle au pont. A droite du débouché du couloir d'accès, une volée de 21 marches permet d'atteindre la galerie de communication des deux abris. Cette galerie, située à 3,75 m sous le niveau de la galerie du barragiste, a une longueur de 15 m et mène aux accès des locaux n° 3 et 4 constituant l'abri aval du pont barrage. Cette galerie, qui a une légère pente, devait être voûtée à l'origine et avoir une hauteur de 2,25 m à la clef de voûte. En visitant l'ensemble, j'ai pu constater qu'elle n'est pas voûtée mais elle garde malgré tout sa hauteur originale.
A l'extrémité de cette galerie, une série de 5 marches placées perpendiculairement à la galerie, descend dans la première chambre de l'abri aval (local 3).
Cette chambre, de 2 m x 2 m, est voûtée et son radier est à 1,20 m sous le niveau de la galerie. Elle possède le même type de support de Mi et a son axe de tir fortement décalé par rapport à l'axe du local, et ce pour la même raison signalée plus haut.
Une étagère de 1,90 m de long est fixée dans la paroi arrière et une gaine de ventilation est créée dans la paroi de droite. Malheureusement, je n'ai pu qu'entrevoir cette chambre car elle est inondée. Un puisard est prévu à proximité de l'embrasure et devait être équipé d'une pompe à main. Une rigole de récolte des eaux est réalisée tout le long de la galerie de communication, le long des marches et dans une partie de la chambre de tir pour aboutir à ce puisard. La personne qui m'a aimablement guidé lors de cette visite, et que je remercie encore une fois, m'a fait remarquer que cette embrasure se trouve, lors de crues importantes, sous le niveau de la Meuse (?)
Face aux escaliers d'accès à la chambre de tir, une étagère a été fixée dans la galerie.
Revenons maintenant au début de la galerie de communication. En parcourant une dizaine de mètres dans cette galerie, on trouve, dans la paroi de droite, un puits vertical de 1 m de côté. Ce puits muni d'échelons permet de monter dans la dernière chambre de tir de l'abri (local 4), qui est aménagée dans la cabine de manoeuvre des vannes. Le puits est fermé par une trappe métallique et aboutit à l'extrémité gauche d'un couloir d'accès.
En effet, cette chambre de tir possède en fait deux accès : le premier, via la galerie de communication, le second, via la galerie du barragiste (ouverte sur l'extérieur) et le passage à hauteur des vannes qui nous mène au pied de la cabine où est aménagé le second accès obturé par une porte en chêne, (protégée par un barrage de poutrelles).
Derrière cette porte, un couloir, d'une longueur de 1,75 m, qui comporte donc l'extrémité du puits, conduit à la chambre de tir, située à 3,20 m au-dessus de la galerie de communication (voir le plan en coupe page suivante).
Cette chambre est relativement grande : 2,30 m x 2,85 m. Elle comprend deux étagères, un lance-grenades et une tablette porte chargeur.
Ici, le placement de l'affût pour Mi se fait sur un énorme bac en béton rempli d'argile. Ce type de support se rencontre dans les abris de PFL 2, mais celui-ci est nettement plus important. Le bac a une longueur de 1,50 m et une largeur de 0,92 m. Vu la hauteur de l'embrasure, le niveau supérieur du bac se situe à 50 cm du sol et une marche en béton a été coulée à l'arrière du bac.
Coupe de l'abri MeMo et ses 4 locaux de tir
Il est à noter qu'ici chaque embrasure possède encore son volet d'embrasure. A l'origine, la partie extérieure des embrasures était maçonnée et n'était ouverte qu'en cas d'hostilités. Ce n'est qu'en 1933, que certaines embrasures d'abris vont être équipées de volets de protection et notamment celles des abris qui sont inclus dans les lignes de défense.
Je vous signale également qu'à l'étage supérieur de la cabine de manoeuvre, au niveau de la porte d'accès vers l'extérieur, le guide m'a montré une goulotte lance-grenades protégeant l'extérieur de la cabine. C'est l'unique trace d'utilisation à des fins militaires de cet étage.
La mission de MeMo 2 est, en ce qui concerne l'abri amont, de croiser le feu de l'abri MeMo 1 bis et de défendre le fleuve en avant du pont et une partie de l'avenue Georges Truffaut. Quant à l'abri aval, il croise 1e feu de l'abri MeMo 3 et défend également une partie de l'avenue précitée et le débouché du tunnel ferroviaire (voir MeMo 3).
Plan de feux de l'abri MeMo 2
Le pont barrage est également repris dans le réseau de destruction, sous l'indicatif Mon/R 1. Sa destruction fut réalisée, le 11 mai 1940 à 11 h 30, par le 3e Bon Gn. Les charges étaient appliquées dans deux voûtes du pont ainsi que dans deux voûtes de la passerelle de service. La nuit du 10 au 11 mai, pour que le barrage ne soit pas détruit, on plaça une vanne de secours dans chacun des quatre pertuis non chargés et deux vannes de secours dans les pertuis chargés. La destruction du pont routier est "réussie" et le barrage continue à remplir son office.
Le pont barrage était également protégé contre l'irruption soudaine d'engins motorisés. Cette protection était réalisée par une obstruction au moyen de barrières "Cointet". Ces barrières étaient maintenues par un câble fixé à deux bornes C. Ces deux bornes devant se situer de part et d'autre du pont routier et sur le trottoir, elles auraient entravé la circulation et été soumises aux feux directs de l'ennemi.
La solution adoptée fut très simple, elles furent tout simplement enterrées dans chaque trottoir. Pour ce faire, on a pratiqué une fouille de 1,10 m de profondeur, maçonné un tube en acier d'un diamètre de 16 cm et d'une hauteur de 85 cm. Ensuite, ce tube reçut un corselet en béton armé ayant, à son sommet, la forme d'un seau renversé, forme traditionnelle des bornes C.
L'accès à cette borne, situé sous le niveau du sol, était obturé par un châssis hermétique "Elkington" du type 1711 C, mais dont la partie supérieure était remplie de béton. Aujourd'hui, ces deux bornes existent peut-être encore, mais les trottoirs du pont routier ont reçu une couche importante de tarmac recouvrant vraisemblablement les deux châssis.
Coupe d'une borne C du pont barrage
Les abris MeMo 3 et MeMo 3bis
Dans les projets d'aménagement de l'île, il est prévu de construire deux ponts rails, un à chaque extrémité de l'île, qui permettront de raccorder les infrastructures ferroviaires du port à la ligne de Maastricht. Déjà on prévoit d'établir un abri double dans la culée de la rive gauche du pont rails qui sera établi un peu en aval du pont barrage.
En 1937, les Ponts et Chaussées remettent à la 3e DGnF le plan définitif de ce pont rails et il s'avère que la culée est trop réduite pour accueillir un abri. Une nouvelle étude est entreprise aussitôt et elle préconise la création de deux abris de berge situés de part et d'autre du pont.
Ils sont à deux embrasures par flanc de tir pour compenser la disparition de l'abri du polygone. Suite à la décision du Lt Gen Van Den Bergen de ne pas doubler les embrasures, un nouveau plan est dessiné, en avril 1938.
Il s'agit de deux abris du type de ceux adoptés pour la défense des canaux et des voies navigables. Ils seront encastrés dans le talus formant les berges de la Meuse, tout en surplombant le plan d'eau. Ils auront donc deux flancs de tir à une embrasure réduite et recevront la protection "type fort", c'est-à-dire que les parois devant subir le tir ennemi auront une épaisseur de 1,30 m de béton armé.
Ces deux abris sont approuvés le 16 mai 1938.
Les abris sont relativement imposants puisque leurs façades ne mesurent pas moins de 11,40 m et ont une largeur de 7,5 m.
L'entrée en est protégée par un châssis en treillis métallique rabattable. Cette grille a été créée en fait pour l'abri MeMo 4 en avril 1936. Vu le type d'entrée de cet abri, il se crée en surface une ouverture béante de 2,50 m x 1 m. Les abris n'ayant pas de clôture, on réalise cette barrière rabattable afin d'éviter la chute de l'une ou l'autre personne et l'emploi de ce trou comme dépotoir.
Après avoir descendu les 14 marches de l'escalier d'accès, on arrive au niveau de la porte grille et à l'évidement devant servir de communication vers les tranchées avoisinantes (voir MeMo 4).
En franchissant le sas, fermé en son centre par une porte à persiennes, on trouve, à droite, un couloir chicané qui est obturé par un barrage de poutrelles. Au fond du couloir, un second barrage de poutrelles ferme l'accès à un puits muni d'échelons. Cette issue de secours est fermée par une dalle "Elkington".
Les deux chambres de tir sont placées dos à dos, de part et d'autre du couloir d'accès. Elles renferment l'équipement habituel et ont un affût "Chardome" pour tireur assis.
La chambre de tir aval est dotée d'une goulotte lance-grenades qui défend le sas d'entrée. Dans la paroi longeant la Meuse, on trouve deux goulottes lance-grenades dont une est équipée d'une muselière située à l'extérieur de l'abri et dont le rôle est d'empêcher la grenade de s'éloigner et, dans ce cas, de tomber dans l'eau. Entre les deux goulottes, une fente d'observation, obturée à l'intérieur par une plaque en acier, permet d'observer dans l'angle mort de l'abri.
Les abris MeMo 3 et 3 bis sont identiques; la seule différence réside dans leurs angles de tir. L'embrasure droite de MeMo 3 bis a un angle de tir de 38° alors que toutes les autres ont un angle de 30°. De ce fait, l'orillon (massif de maçonnerie à l'angle d'épaule d'un bastion) de protection de l'embrasure est un peu différent (voir plans).
Toutes les embrasures disposaient d'un volet métallique rabattable.
Les Ponts et Chaussées commencent la construction du pont rail et procèdent à l'endiguement de la rive gauche du fleuve. En vue d'éviter le chevauchement des chantiers, on reporte la réalisation des abris à juillet 1938. Ce sont les entreprises Pierre BOUSMANNE, de Bruxelles, qui reçoivent le marché.
Plan de l'abri MeMo 3
Partie du plan de l'abri MeMo 3 bis (à remarquer l'orillon différent)
1. escalier d'accès - 2. accès aux tranchées - 3. puisard - 4. porte grille - 5. porte à persiennes - 6. barrage de poutrelle - 7. issue de secours - 8. fente d'observation - 9. goulotte lance-grenades - 10. chambre de tir - 11. ventilation
On procède au bétonnage en octobre et novembre de la même année et ce, malgré un mois d'octobre particulièrement froid (voir en annexe 1 le relevé des températures pris par l'entrepreneur sur le chantier). Les travaux s'achèvent en février 1939. L'entrepreneur doit cependant encore procéder à une modification des berges du fleuve, réalisées récemment, afin de dégager les champs de tir.
La remise des abris au 12e Régiment de Ligne est faite le 21 février 1939, en présence du capitaine Emile RENKIN, délégué du commandant de ce régiment .et qui, à cette occasion, rédige un inventaire des deux abris (voir annexe 2)
Ici aussi, il était prévu de relier les abris aux réseaux téléphoniques, tant aérien qu'enterré.
La mission de l'abri MeMo 3 consiste à flanquer le plan d'eau à l'aval du pont barrage, de protéger celui-ci et de battre une partie de l'avenue de l'Indépendance.
MeMo 3bis flanque le plan d'eau, le débouché du tunnel du chemin de fer au-delà de 1a Meuse ainsi que le pont rails, avec sa amont. La Mi aval croise le feu de l'abri h1eelo 4 et protége une partie de l'avenue.
Quant aux créneaux d'observation, ils observent le débouché du tunnel et la rampe d'accès du poste permanent d'alerte n° 5 (P.P.5a) situé sur la rive opposée.
Plan de feux des abris MeMo 3 et 3bis
A proximité de l'abri MeMo 3, le pont rail est repris dans le réseau de destruction sous l'indicatif : Mon/f1. C'est le 3e Bon Gn qui procède à sa destruction le 11 mai 1940. Elle est réussie bien qu'un raté ai pu se produire, car la tête de la 3ème pile de la rive droite émerge encore. Actuellement, on peut encore voir l'obstruction réalisée à l'entrée du pont du côté de la rive gauche. Il s'agit d'une borne "Cointet" et d'une borne de conception particulière. Elles permettaient l'arrimage de deux éléments "Cointet" (voir photo).
Annexe 1
Annexe 2 - INVENTAIRE DES ABRIS MeMo 3 et MeMo 3 bis
Estampillé du cachet "SECRET"
Le 21 février 1939
RENKIN, Emile, Capitaine
Délégué du Commandant du 12ème régiment de ligne.
avons procédé, le premier à la remise au second, le second à la remise au premier et à la reprise au troisième, le troisième à la reprise au second des bâtiments précisés dénommés MeMo 3 et MeMo 3 bis.
Ces bâtiments sont situés sur la rive gauche de la Meuse aux abords du pont rails de l'île Monsin.
Ces bâtiments sont recouverts extérieurement d'un peinturage de camouflage.
Le bâtiment MeMo 3 comprend :
2 locaux de tir - 1 couloir d'accès - 1 puits d'accès
Dans les locaux de tir sont fixés à demeure ou déposés :
2 bancs en chêne type Bn2
2 affûts métalliques "CHARDOME"
8 m ct d'étagères type Et en chêne avec consoles métalliques galvanisées
2 tablettes en chêne pour le chargement.
8 blochets de calage pour barrage de poutrelles
2 crochets porte lampe type L1.
8 crochets porte fusils type L2.
8 crochets porte habits type L3.
2 volets métalliques type Vo4 avec 1 cadenas et 1 clef chacun
2 leviers en fer forgé galvanisé type Lv.
1 volet métallique Vo1 pour gaine en tôle galvanisée type Gn4.
Dans le couloir d'accès et le puits de sortie sont fixés à demeure ou déposés .
1 porte grille type PI galvanisée avec volet à charnières avec 1 cadenas et 1 clef.
1 porte à persiennes type P2.
1 trappe à déclic type Tr3 avec dispositifs de manoeuvre
1 châssis métallique en deux pièces avec cadre en cornières avec 2 cadenas et 2 clefs.
2 volets métalliques Vo avec gaine en tôle galvanisée type Gn4
1 grille muselière type M.S. pour gaine Gn4.
1 échelle en fer galvanisé à dix échelons
1 grille en fer forgé galvanisé pour puisard
1 plaque en acier, spéciale pour observatoire
24 profilés de 0.84 m pour barrage poutrelles
24 profilés de 1,04 m pour barrage poutrelles
Extérieurement
10 plans ampelopsis veitchi
7 plans polygonum baldschuanicum
L'abri MeMo 4
Voici un abri qui a fait couler beaucoup d'encre. La première étude réalisée pour la défense de l'île préconise la construction d'un abri, repris sous la lettre A, dans la future courbe de la Meuse. Cet abri, du type des voies navigables, comprend un double flanc de tir et une cloche FM. Chaque flanc sera pourvu de deux embrasures pour Mi.
Le Gen Maj Fontaine, directeur du Génie et des Fortifications en 1935, estime que : vu les principes admis jusqu'à présent pour la défense directe de la Meuse et du canal, seul l'aménagement d'abris dans les ouvrages d'art est à envisager et, de ce fait, l'abri A sera purement et simplement supprimé. Par contre, si de nouveaux crédits étaient accordés à la PFL, on pourrait envisager la construction de cet abri, mais il ne comprendrait plus qu'une embrasure par flanc et la cloche serait supprimée.
En octobre 1935, ce même directeur donne l'ordre aux dessinateurs de la 3e DGnF de réaliser les plans d'un abri des voies navigables avec une cloche FM et qui prendra la dénomination MeMo 4 à la place de la lettre A.
En novembre de la même annexe, les dessinateurs réalisent le plan du futur abri, que je vous livre ci-dessous.
Plans de l'abri MeMo 4 avec une cloche
Mais revenons un peu en arrière pour comprendre ce qui va suivre.
En avril 1935, suite à une demande de l'Etat-Major français pour que nous fortifiions la Meuse entre Givet et Namur, et entre Namur et Liège, on entreprend la construction d'abris de contre irruption devant chaque pont-route et chaque pont rails franchissant le fleuve.
Le général Van Den Bergen rédige une note qui est envoyée à la 3e DGnF, le 22 novembre 1935. Elle dit ceci : "L'abri MeMo 4 projeté est à revoir car les abris de contre irruption de la Meuse ne seront pas équipés de cloches. Dès lors, il apparaît exagéré de consacrer 175.000 francs pour doter cet abri, coûtant 65.000 francs, d'une cloche FM. Ainsi, il convient de revoir le plan de l'abri et je suggère de percer la face avant de deux fentes horizontales permettant de voir la rive opposée et de les aménager pour permettre le tir avec un FM".
La suppression de cette cloche pose malgré tout un problème. Celle-ci permettait une action sur l'arrière de l'abri afin de lui assurer une bonne défense rapprochée, mais également, elle empêchait toute infiltration ennemie dans une bonne partie de l'île car le terrain environnant étant plat, le FM pouvait battre une superficie importante.
Pour pallier cette suppression, on va tout d'abord doter l'abri de trois embrasures pour FM dans sa façade, ce qui permet de couvrir tout le secteur avant non défendu par les deux Mi. Pour défendre la zone arrière, on creusera des tranchées, accessibles aux occupants de l'abri par l'issue de secours.
En décembre 1935, le plan remanié de l'abri MeMo 4 est soumis à l'approbation de l'EMG, qui approuve les trois créneaux pour FM mais rejette catégoriquement que l'issue de secours serve de seconde entrée pour l'abri.
Il est bien évident que le raccordement de l'abri au réseau des tranchées par la sortie de secours oblige les occupants à dégarnir celle-ci de ses poutrelles de protection et, dans ce cas, elle devient une entrée supplémentaire qui n'est en aucun cas étudiée pour cet usage. En cas de bombardement, un projectile tombant dans le voisinage immédiat de l'abri pourrait avoir des effets néfastes à l'intérieur de celui-ci. Une patrouille ennemie pourrait également utiliser cette voie et faire irruption dans l'abri.
D'autre part, l'usage courant d'une ouverture de 60 cm x 30 cm est très malaisé. C'est pour toutes ces raisons qu'une baie de communication est envisagée et finalement adoptée en janvier 1936.
Cette baie consiste en un accès voûté de 1,50 m de haut et 0,80 m de large, créé au pied des escaliers menant à la porte grille du sas d'entrée. La baie est fermée, en temps de paix, par une maçonnerie de briques liées par du mortier pauvre. Cette maçonnerie est ensuite recouverte par un crépi de ciment pour parfaire le camouflage. En temps de guerre, le parement sera détruit par les occupants de l'abri qui, par une sorte de tunnel, aboutiront sans se découvrir au réseau de tranchées.
Le tunnel d'accès aux tranchées est en matériaux différents suivant la nature du terrain. En ce qui concerne MeMo 4, il est simplement creusé dans la roche et renforcé par des rondins.
Cette baie de communication sera adoptée pour de nombreux abris construits en Belgique.
Coupe de la baie de communication
Suite à tous ces changements, un nouveau plan est dressé et approuvé. L'accès de l'abri est identique à ceux de MeMo 3 et 3 bis, bien qu'à un certain moment, il ait été envisagé d'entrer par l'arrière de l'abri grâce à une porte à double battant du type de celles qu'on rencontre dans les fortifications allemandes.
Après avoir franchi le sas, un couloir mène à une sorte de caponnière ou se situent les trois embrasures FM Cette caponnière est séparée des deux locaux de Mi par un piédroit qui permet de diminuer la portée de la dalle de ciel, de renforcer la caponnière, de limiter les conséquences d'un coup d'embrasure et de permettre néanmoins une utilisation aisée des deux embrasures FM pour tireur debout.
Le support FM consiste en un volet rabattable à 90° sur lequel se pose le bipied du FM et, lors de la fermeture du volet, une fente verticale permet l'observation. Plutôt qu'une longue description de ce type de support, je vous renvoie aux deux photographies prises au fort de la Chartreuse qui possède, dans le PC de la 3e DI, aménagé dans une de ses poternes, le seul exemplaire connu de ce volet.
La chambre de tir aval possède une issue de secours qui débouche dans le couloir d'accès. Celle-ci est prévue en cas d'obstruction de la caponnière. La chambre de tir amont comporte une issue de secours du même type que celle de MeMo 3 et 3 bis.
Trois goulottes lance-grenades sont prévues : une d'elles défend le sas d'entrée et est située dans le local de tir aval; les deux autres devaient être aménagées dans la caponnière mais ne sont pas reprises sur le plan de l'abri.
Le chantier de l'abri est terminé en 1937; pourtant l'odyssée de MeMo 4 n'est pas encore finie. Le 10 mars 1939, on envisage de reboucher les trois embrasures FM suite au projet de construction des abris MeMo 3 et 3 bis.
L'EMGA, considère, seulement maintenant, que les trois embrasures aménagées dans la façade avant constituent un point faible pour l'abri car elles déforcent considérablement la résistance de celle-ci à un tir de face. Malheureusement, je n'ai pas trouvé de document me permettant de vous dire si ces embrasures ont été réellement rebouchées et, de plus, l'abri a probablement été démoli bien avant que ma passion pour les abris ne voie le jour.
En considérant que ces embrasures soient opérationnelles, MeMo 4 croise les feux de l'abri MeMo 5 et MeMo 3 bis et les trois FM défendent une partie de l'avenue de l'Indépendance avec un champ de tir de 120°.
Le camouflage de l'abri est réalisé par peinturage se rapportant aux talus gazonnés des berges.
Plan de feux de l'abri MeMo 4
L'abri MeMo 5
Auparavant cet abri, repris sous la lettre B, était du type des voies navigables à deux flancs de tir ayant chacun une embrasure pour Mi. Il était situé un peu en aval du pont Milsaucy, sur la pointe de terre séparant la Meuse du canal Albert.
En juin 1935, on renonçait provisoirement à sa construction, vu le manque de crédits.
Mais l'abri est de nouveau projeté, vers décembre 1935, et une étude du terrain est réalisée car, à l'endroit défini au préalable, de nombreux travaux ont été entrepris. Il s'avère que l'emplacement choisi se situe sur un égout collecteur qui se déverse un peu en amont du pont de Wandre. Dès lors, la masse de l'abri ne pouvant s'appuyer sur la voûte du collecteur, des fondations spéciales devront être envisagées.
Mais les crédits sont minimes et il faut prévoir un nouvel emplacement pour l'abri.
La mission dévolue à MeMo 5 est d'assurer la continuité des feux des abris MeMo 4 et MeMo 5. Or, vu son déplacement à la pointe nord de l'île, il convient de changer le type de l'abri afin que cette mission puisse être assurée. Les dessinateurs se repenchent sur leurs tables à dessin et réalisent un avant-projet qui tient compte des angles de tir particuliers résultant de l'emplacement des deux abris à couvrir.
La 3e DGnF soumet à l'approbation de l'EMGA un abri comportant deux chambres de tir avec un affût "Chardome" pour tireur assis, une entrée en sas sur la façade latérale et une issue de secours en puits sur l'arrière de l'abri. Ce projet est approuvé et MeMo 5 est construit et terminé vers 1936-1937.
Je ne possède pas d'autres renseignements sur cet abri qui ne figure sur aucun document disponible au CDH, à part le plan que je vous livre ci-dessous.
Plan de l'abri MeMo 5
1. escalier d'accès - 2. sas d'entrée - 3. créneau FM et observation - 4. goulottes lance-grenades - 5. chambres de tir pour Mi - 6. issue de secours
La mission de Meo 5 consiste donc à couvrir les feux de l'abri MeMo 6 et ceux de MeMo 4.
Plan de feux de l'abri MeMo 5
L'abri MeMo 6
Cet abri se trouve dans l'énorme culée du pont de Wandre située sur la bande de terre séparant le canal du fleuve. Elle supporte le pont enjambant le canal et la première travée du pont qui enjambe la Meuse. Ici aussi, l'entrée de l'abri pose un problème car si celle-ci est aménagée à hauteur du halage, elle expose les occupants aux coups directs de l'ennemi. Par contre, la culée possède un escalier monumental qui permet de descendre sur la berge. La solution préconisée consiste à créer, à hauteur du palier, une entrée aboutissant à un escalier conduisant à une galerie qui rejoindra l'abri proprement dit.
C'est cette solution qui est retenue et réalisée par le service des Ponts et Chaussées qui construit l'abri MeMo 6 pour le compte du département de la Défense Nationale. La somme allouée à ce service par la DN est de 200.000 francs.
Donc l'entrée de l'abri se situe à hauteur du palier où démarrent les deux volées de marches conduisant au sommet du pont. Une fois la porte franchie, nous descendons 13 marches qui aboutissent au niveau du couloir d'accès. Ce couloir a une longueur de 13,50 m. Sa largeur est de 1 m et sa hauteur est de 2 m. A peu près au milieu du couloir, un second couloir, perpendiculaire au premier, mène à une porte qui débouche sur la bande de terre. Cette issue permet aux occupants d'accéder au réseau de tranchées créé à cet endroit.
A l'extrémité du couloir d'accès, une volée de 8 marches mène au pied de la porte à persiennes qui obture la première chambre de tir de l'abri. Cette chambre de tir est identique à toutes celles que l'on connaît et comporte un affût "Chardome" pour tireur debout.
A l'arrière de ce local, un couloir d'une longueur de 12 m accède à la seconde chambre de tir. Au centre de ce couloir, un petit local est aménagé et comporte l'issue de secours ainsi que l'emplacement des deux tablettes supportant la machine à charger les bandes de Mi.
Plan de l'abri MeMo 6
Plan en coupe de l'abri MeMo 6
J'ai pu entrer dans cet abri en passant par l'ouverture de l'embrasure amont (à déconseiller). Là, j'ai constaté que la galerie d'accès a été abaissée à environ 40 cm du sol, sur une longueur d'une dizaine de mètres, par du béton armé.
Cette réduction de la hauteur de la galerie d'accès fut probablement réalisée lors de la création du tunnel du chemin de fer dans le pont de Wandre, permettant de relier le réseau ferroviaire de l'île à l'usine de Chertal.
L'abri MeMo 6 a pour mission d'assurer le flanquement vers l'amont et vers l'aval du plan d'eau et du chemin de halage de la rive gauche de la Meuse. L'embrasure amont doit croiser les feux de l'abri MeMo 5.
Le pont de Wandre est repris dans le réseau de destruction sous l'indicatif : Hr/r1/r2. C'est le 3e Bon Gn qui procède à la destruction de ce pont ainsi que des piles de l'ancien pont.
Les deux parties du pont de Wandre et les piles de l'ancien sautent le 11 mai 1940 (voir photo).
Plan de feux de l'abri MeMo 6
L'abri MeMo 7
Au préalable, cet abri est repris sous la lettre C et est projeté loin en aval du pont de Wandre, sur la berge de la Meuse.
Il est le dernier abri de ce secteur et doit assurer la continuité des feux entre le pont de Wandre et le premier abri de l'intervalle Pontisse - Lixhe (PL). A cette fin, il aura deux flancs de tir ayant chacun deux embrasures pour Mi, et possèdera également une cloche FM.
Lors du nouveau plan de défense de l'île, dressé par le Gen Maj FONTAINE en juin 1935, l'abri C ne comporte plus qu'une seule embrasure par flanc et sa cloche FM est supprimée.
C'est ce type d'abri qui est adopté et sa construction peut être envisagée. Mais l'emplacement choisi par l'EMGA pour l'édification de MeMo 7 n'est pas encore aménagé, et de ce fait, sa construction est postposée.
A cet endroit, le cours de la Meuse sera rectifié par les Ponts et Chaussées car le fleuve a un cours très sinueux et sa largeur change constamment, ainsi que sa profondeur, entre le pont de Wandre et celui de Hermalle-sous-Argenteau. Il y a aussi de nombreuses îles qui se sont formées au fil du temps, notamment celle de Franche Garenne, et on veut les voir disparaître.
Ce travail doit être réalisé en trois phases : la première consiste à supprimer le coude de Chertal, à ramener la largeur du fleuve de 250 m à 180 m, et à construire un boulevard le long de la rive droite.
La seconde phase comprend la rectification, l'approfondissement et l'élargissement du fleuve entre Vivegnis et l'aval du pont d'Argenteau ainsi que la suppression d'une bonne partie de l'île de Franche Garenne.
Enfin, la troisième phase réside dans la construction de barrages et d'écluses.
L'emplacement de l'abri MeMo 7 est donc dépendant de la première phase des travaux qui, en 1936, ne sont pas encore entamés.
Emplacement prévu pour l'abri MeMo 7
Tous ces aménagements du fleuve prennent de plus en plus de retard et, le 10 mai 1949, cette partie de la Meuse n'est pas encore terminée. Notre abri MeMo 7 ne verra jamais le jour.
Cet abri devait se situer à 500 m en aval du pont de Wandre et sa mission consistait à croiser les feux des abris MeMo 6 et PL a.
L'abri PL a devait être le premier abri de l'intervalle Pontisse - Lixhe et il était prévu à 1.800 m de MeMo 7, sur la berge du fleuve. Cette partie n'étant pas encore modifiée, l'abri ne verra pas le jour, lui non plus.
Autrement dit, malgré toutes les études réalisées par les différents services de la Défense Nationale en vue de couvrir d'un feu continu de mitrailleuses tout le plan d'eau du fleuve, il existera, le 10 mai 1940, une zone de 2.300 m non défendue. Les événements feront que ceci ne portera pas à conséquence.
L'abri M 26
En avril 1935, lors d'une conférence à Paris, les Français nous demandent de fortifier la Meuse entre les villes de Givet et Liège. Une étude est entreprise et, vu le manque important de crédits, on décide de ne construire des abris que devant chaque ouvrage d'art permettant le passage du fleuve.
Ces abris seront du type contre irruption, équipés d'un canon de 47 mm et d'une ou de plusieurs mitrailleuses. Ils ne posséderont pas de cloche mais seront dotés d'un phare puissant.
Le pont de Wandre étant repris dans la liste des ouvrages d'art, un abri sera construit dans l'axe du pont et portera l'indicatif M 26 (Meuse n° 26). Il est bien entendu que ces abris ne font pas partie de la PFL et que M 26 n'entre pas dans le plan de défense de l'Île Monsin mais, vu qu'il la complète, je me permets de vous le décrire.
L'abri est construit à l'intersection de la rue des Princes et de la rue du Grand Puits, en plein milieu de la chaussée. I1 est très important puisqu'il comprend un sous-sol et trois niveaux.
Le canon de 47 mm, devant empêcher le franchissement du pont par un engin blindé, est situé au dernier niveau de l'abri car la rue des Princes est en pente, et, afin de rattraper cette déclivité, il faut élever le canon pour que celui-ci puisse prendre en enfilade l'entièreté du pont.
Le sous-sol de l'abri sert probablement pour le stockage des vivres et munitions et un WC y est aménagé. Le rez-de-chaussée comprend l'entrée de l'abri, créée dans la façade arrière, ainsi que deux créneaux pour fusils ou FM. Cette pièce servira également de corps de garde permanent.
Le premier étage abrite un affût "Chardome" placé pour tirer dans l'axe du pont. Chaque face latérale est percée d'un créneau pour fusil et d'une goulotte lance-grenades, tandis que la face arrière reçoit un créneau pour FM.
Le second étage comprend le canon antichar et le phare dont les embrasures sont orientées vers le pont.
Chaque ouverture de tir est protégée par un volet placé à l'extérieur.
Le camouflage de l'abri est particulièrement soigné. L'abri est camouflé en maison d'habitation (voir photo). En mars 1939, le corps de garde en planches, installé à côté de l'abri, devra être démoli afin de respecter l'ensemble. Mais ce camouflage devra être revu suite à des travaux prévus par les Ponts et Chaussées. Je vous cite une partie de la note émise, le 17 avril 1939, par la Défense Nationale : "Le camouflage réalisé à M 26 vaut dans le site actuel mais il sera entièrement à revoir lorsque l'autostrade LONDRES - ISTAMBOUL sera construite". A l'époque, on voyait déjà grand et je pense qu'il est inutile de vous dire que la note était nettement prématurée et que le camouflage de l'abri n'a pas été modifié.
Le premier phare, en dotation dans les abris de contre irruption, est du type MAGONDEAUX. Il fonctionnait grâce à un chalumeau alimenté par de l'acétylène et de l'oxygène et l'éclat provoqué était envoyé vers un miroir de la marque MANGUIN. Sa portée était de 500 m par temps clair, et son autonomie était de plus ou moins 15 heures. En avril 1939, la Direction Supérieure du Génie de Forteresse préconise l'emploi de projecteurs de la marque WILLOCQ-BOTTIN (de Bruxelles) qui, eux, fonctionnent grâce à l'alimentation électrique. Ce type de projecteur a un meilleur rendement que l'ancien et il équipe depuis peu tous les IR de la PFL 3.
Afin de standardiser le matériel, les abris de contre irruption de la Meuse seront équipés de ce projecteur. Pour ce faire, il faut évidemment relier les abris à un réseau d'alimentation électrique et ce sont les Etablissements PIRE (Bd d'Avroy à Liège) qui vont effectuer les travaux de raccordement de l'abri M 26.
Ce raccordement est réalisé en souterrain sous une tension de 110 volts en alternatif et l'abri est équipé de prises de courant, d'interrupteurs et de hublots d'éclairage.
Pour l'installation du matériel indispensable au projecteur, une armoire est installée au 2e étage de l'abri. Elle renferme les batteries d'accus et un groupe redresseur à oxymétal de la marque WESTIMGHOUSE, pour le chargement des batteries.
En septembre 1939, tous les travaux sont terminés. L'entretien des projecteurs et des batteries sera assuré par du personnel du Bon TTR/CA dont la formation sera faite par le directeur de la 3e DGnF, à l'abri M 26, le 25 septembre de la même année.
Cet abri était occupé en permanence.
Plan des feux de l'abri M 26
Je n'ai jamais connu cet abri car il fut démoli très vite, vu sa situation. Après la guerre, il servait d'abri aux personnes qui attendaient le tram desservant la commune de Herstal. Il n'existe aucun dossier concernant M 26 au CDH. Le seul plan que je possède et que je vous livre est celui réalisé pour le raccordement électrique et fourni aux Etablissements PIRE.
Photos
Plans de l'abri M 26 (les 4 photos)
(Suite et fin dans le prochain bulletin)
L'abri MeMo 1 bis
Vue d'ensemble du Mémorial
A l'avant-plan, le puits d'accès de l'abri MeMo 1 bis
Accès de l'abri MeMo 1 bis (fausse porte)
Issue de secours de l'abri MeMo 1 bis
L'entrée de l'abri MeMo 2 et les volets d'embrasure des locaux de tir 1 et 2 (volet de gauche à peine visible)
Porte en chêne fermant le second accès du local 4
La cabine de manœuvre et les deux volets d'embrasure des locaux 2 et 3
Volet d'embrasure du local n° 3 de MeMo 2
Vue de la façade de l'abri MeMo 3
Vue sur une embrasure de l'abri MeMo 3. A l'arrière-plan, le pont rails reliant Monsin à la ligne de Maastricht à hauteur de Jupille
La barrière rabattable protégeant l'accès de l'abri MeMo 3
A l'avant-plan, borne spéciale. A l'arrière-plan, borne "Cointet" du pont rails
Embrasure amont de l'abri MeMo 5
Embrasure aval de l'abri MeMo 5
Accès de l'abri MeMo 6
Vue de l'embrasure aval de MeMo 6
Vue de l'embrasure amont de MeMo 6
Vieille photo de l'abri M 26
Ci-dessous, deux photos aériennes, récentes, qui donnent une vue d'ensemble du site où se situent encore certaines fortifications dont E. COENEN nous entretient dans son article.
Photos
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Joseph THONUS - Regard sur l'histoire de l'ARTILLERIE 1/4

PREFACE
"Quelle belle chose que la guerre ! Comme on aime son camarade d'armes ! Lorsqu'on sent que l'on sert une juste querelle et que l'on est en forme au combat, les larmes nous en viennent aux yeux ... De tout cela naît une délectation telle que ceux qui n'y ont pas goûté ne peuvent s'en faire une idée." "Vous croyez sans doute qu'un homme y craint la mort. Il n'en est rien. Il se sent si fort, si exalté qu'il ne sait plus où il est. En vérité, il n'a peur de rien."
Ainsi s'exprimait "JEAN de BUEIL" qui servit sous les ordres de JEANNE d'ARC au XVe siècle.
Voilà certes une citation qui souligne sans ambages la leçon que nous a donné jusqu'à présent l'art majeur de la guerre qu'est l'armement. Ce fait, qui de nos jours, suscite un sentiment si désagréable, était cependant autrefois ouvertement accepté.
Depuis la massue de l'homme des cavernes, en passant par le feu grégeois, jusqu'aux fusées balistiques intercontinentales, fasciné par le pouvoir, l'homme a toujours chéri la guerre et les armes, si fort qu'il y a mis le meilleur de lui-même.
On a dépensé de telles sommes de science pour le développement et le raffinement des armes, qu'on se trouve aujourd'hui devant un danger sans précédent. Notre pouvoir actuel de destruction est si grand que nous n'osons nous en servir; aussi nos hommes d'Etat et nos stratèges ne peuvent-ils maintenant penser qu'en termes de guerres "limitées".
Aussi, si durant la guerre civile américaine, le Général SHERMAN pouvait dire : "Le but qui légitime la guerre est d'atteindre à une paix plus parfaite", fasse le ciel que dans l'avenir une "nouvelle quête de paix plus absolue" n'entraîne un jour les sombres pouvoirs de la destruction libérés par la science, et n'engloutissent toute l'humanité dans une ruine voulue ou accidentelle.
LE POUVOIR DES ARMES
En principe, l'histoire de l'armement va de pair avec l'histoire de la guerre, car, à travers les âges, les armes ont été d'abord à son service et ont toujours fasciné le genre humain.
En retracer l'historique serait aussi en parcourir le palpitant récit de l'ascension et de la chute des empires et de la vie de ces hommes inoubliables que furent Alexandre le Grand, Jules César, Napoléon ...
C'est l'histoire des grandes forces de l'Histoire, et aussi des pressions économiques, des ambitions pour conquérir le pouvoir et s'en emparer, les transformations des structures sociales, les révolutions dans la technique. En synthèse, un vaste, un bouleversant panorama des activités humaines, de ses inventions, ses ambitions, l'aventure, les hauts-faits. L'influence de l'armement sur l'histoire du monde fut primordiale.
Rome a conquis son empire par la gloire et l'a perdu par la faute d'archers montés. Les Chevaliers ont dominé l'Europe féodale en lui imposant leurs propres conceptions de la vie et de l'art de la guerre, jusqu'à ce que ces conceptions soient démodées et anéanties par les archers anglais, et par l'invention des armes à feu et de l'artillerie.
AVANT LES ARMES A FEU
Science neuve fournissant des armes susceptibles d'organiser la guerre, l'art de travailler le métal fut le bond dans la technique qui assura l'essor de la civilisation.
L'épée, l'arc, la hache, la lance furent les principales armes de guerre pendant des milliers d'années.
Au Moyen Age, l'Europe était fragmentée en d'innombrables petits fiefs, tous liés les uns aux autres par la politique féodale d'un prêté pour un rendu et formant de menus royaumes. Nulle terre sans seigneur, nul seigneur sans terre, tel était le principe même de la féodalité.
Le seigneur d'un lieu assurait la sécurité de ses habitants, lui-même confiant le soin de sa propre sécurité à un duc ou à un comte, qui, en contrepartie de prestations de nature militaire, lui laissait la suzeraineté de ses terres ou de son fief.
L'Eglise dont les biens devenaient des citadelles aussi bien temporelles que spirituelles, jouait sa part active, et, à la fin du Xe siècle, possédait un cinquième des terres de France et d'Angleterre, près d'un tiers de celles de l'Allemagne. Le Roi, quant à lui, ne jouissait que de la seule prérogative de se trouver au sommet de la pyramide.
Après avoir brisé la dernière résistance de l'infanterie, la chevalerie domine pendant plus de trois cents ans la guerre occidentale, Méprisant le fantassin, et tout armement qui n'était pas le sien, le Chevalier regardant la vie du haut de sa monture, avait une superbe redoutable.
Ce devait être un spectacle magnifique que de voir ce fier combattant bardé de 50 à 80 livres d'acier, montant son puissant et massif destrier, son imposante et redoutable lance au repos, son épée à deux mains pendant à son côté, ses écuyers à sa suite !
Etre Chevalier était synonyme de richesse car l'équipement représentait à l'époque une petite fortune; aussi, seul un gros propriétaire terrien pouvait-il s'offrir le luxe de se vêtir d'acier de la tête aux pieds, et d'entretenir une telle monture et une armée de vassaux. Et cependant, s'il était un farouche combattant, le Chevalier était un piètre soldat et l'impression de puissance qu'il inspirait était sans proportion avec sa valeur "militaire".
De plus, la hiérarchie de commandement de l'armée médiévale était directement liée au rang social et non à la compétence. Aucune notion de stratégie ou de tactique n'existait.
Attaquant en groupes épars, les chevaliers provoquaient ensuite l'adversaire en combat singulier, dans l'espoir de le faire prisonnier et d'en réclamer une rançon.
Photo
Après avoir vu son épanouissement, les faiblesses de l'armée féodale d'Europe furent mises en évidence pendant les Croisades, bien qu'à ce moment ils disposèrent de la seule invention militaire réellement valable, l'arbalète, arme d'une efficacité telle qu'elle fut interdite par l'Eglise, sauf contre les "Infidèles".
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Arbalète à cric (± 60 cm)
Arbalète à tour. A trois roues et un point fixe (pivot)
Et pourtant, la Chevalerie, ayant survécu à la pique et à l'arc, opposa une résistance obstinée à une nouvelle menace, la plus dangereuse jusqu'alors, celle des armes à feu.
L'APPARITION DES ARMES A FEU
Face à ce nouveau danger, au XVe siècle, le Chevalier abandonna la cotte de maille pour l'armure à plates.
L'on vit apparaître les meilleures et les plus belles armures, qui furent exportées dans toute l'Europe. Mais si les armuriers poussèrent le raffinement à l'extrême au début du XVIe siècle, le déclin s'ensuivit rapidement car les chevaliers ne pouvaient tenir indéfiniment.
Leurs places fortes étant déjà tombées, ils étaient plus ou moins sans défense devant le Roi, disposant d'une artillerie et de troupes professionnelles.
Au Moyen Age, le château fort avec ses donjons, ses herses, ses mâchicoulis, ses réduits, était devenu très puissant. Il était difficile de le prendre, malgré des sièges prolongés.
Après l'investissement, il fallait passer à l'attaque des remparts : bombardement avec des mangonneaux, des balistes, des trébuchets, utilisation de tourelles mobiles, de béliers, pour forcer et escalader les remparts. Ensuite les combats se poursuivaient de donjon à donjon.
Deux engins de siège
Photos
Quelques engins pour l'attaque des remparts
Le scorpion (reproduction d'un cuivre de 1583)
Capable de lancer des boulets ronds, incendiaires, et des traits lourds de toutes sortes
Ce monstre était destiné à envoyer sur la ville assiégée des boulets incendiaires comme de lourdes pierres.
Bien que l'artillerie eût beaucoup progressé dès le XVIe siècle, on construisait encore des engins aussi primitifs que celui-là.
L'apparition de l'artillerie bouleversa tout cela. Alors qu'auparavant, un siège d'environ un an s'avérait nécessaire pour prendre une seule place forte, en 1449, CHARLES VIII en prit soixante aux Anglais en Normandie.
Jeanne d'Arc a dressé le siège d'ORLEANS avec l'appui de l'artillerie. Le siège de CONSTANTINOPLE, en 1453, vit le premier bombardement organisé de l'histoire. Pendant quarante jours, une douzaine d'énormes canons auxquels s'ajoutèrent cinquante-six autres plus petits, lancèrent des pierres dont les plus grosses pesaient des centaines de livres.
Enfin, ce fut en 1492, qu'à GRENADE, le dernier bastion musulman en Espagne se rendit à l'artillerie de la Reine ISABELLE.
Acculé par ces progrès, le Chevalier se retirait dans un monde chimérique de haute courtoisie et de tournois. Après avoir vu son épanouissement, la chevalerie dégénère en frivolités; c'est le moment de l'amour courtois et des fades romances. Agonisant dans la réalité, la chevalerie s'exalte artificiellement.
Un aspect de la vie chevaleresque était représenté par le tournoi, qui, bien qu'un jeu brutal et sanglant à l'origine, était devenu un spectacle rituel et raffiné se déroulant dans des arènes pavoisées, sous l'oeil admirateur des dames. Il se prolongea jusqu'au XVIe siècle et contribua à donner au Chevalier le sentiment de son importance;
Tandis que les chevaliers s'adonnaient à leurs jeux, les guerres étaient de plus en plus livrées par des soldats professionnels, non seulement par les piquiers mercenaires suisses, mais aussi par les lansquenets et les condottieri italiens.
La philosophie militaire change : si la fraude est odieuse en toute affaire, elle devient digne d'éloges et glorieuse dans les opérations guerrières. En raison de l'usage de plus en plus fréquent de la poudre, la guerre avait perdu tout vestige d'idéalisme et de chevalerie, et devenait une science.
Les guerres d'Italie, qui, de 1494 à 1525, opposèrent les Français aux HABSBOURG, furent de véritables terrains d'essai où se mêlaient ancienne et nouvelle techniques. RAVENNE fut le premier succès concluant de l'artillerie (1512).
A MARIGNAN, en 1515, l'artillerie de FRANCOIS Ier ouvrit des brèches dans les phalanges suisses, mais seulement afin d'y faire pénétrer les charges de sa cavalerie médiévale. Quoique la pique ait survécu bien des années encore, les formations suisses eurent beaucoup à souffrir de l'artillerie qui mit fin au mythe de leur invincibilité.
Toutefois le changement le plus important résidait dans l'emploi de soldats professionnels et d'armes à feu. Le chevalier avait pratiquement disparu de la scène.
L'artillerie avait réduit tant de places fortes qu'il fallut en venir à un nouveau type de fortification susceptible de résister à l'assaut du canon. Ainsi apparurent les douves, les terrassements et les créneaux, munis à leur tour de canons. Enfin le mousquet, arquebuse améliorée, fit de grands dégâts parmi les Suisses.
De plusieurs manières, les guerres d'Italie, comme la Renaissance, marquent la fin du Moyen Age et l'aube d'une ère nouvelle.
Désormais l'histoire de l'armement sera celle des armes à feu.
Cette "nouveauté", offrant une possibilité de destruction quasi systématisée, l'homme d'Occident déplore très vite le pouvoir de la poudre, cette "invention maudite !", "ignoble instrument de mort !", s'écriait l'ARIOSTE. "Quant à l'arquebuse, c'est l'invention du démon pour nous livrer au meurtre".
L'origine des armes à feu est obscure. Les Chinois semblent avoir possédé la poudre dès le XIe siècle. Au XIIe siècle, les Arabes l'introduisaient en Occident, avec, semble-t-il, le premier et rudimentaire canon.
Les premiers canons étaient les "POTS DE FEU", baquets de fonte chargés de poudre et de pierres, mis à feu par un trou à la base; ils donnèrent naissance à la forme familière des cylindres de laiton ou de cuivre, puis de fer.
Photos
En 1346, à CRECY, les canons intervinrent au siège de CALAIS.
"Le Seigneur et la douce Vierge Marie en soient loués, ils ne blessèrent ni homme ni femme, ni enfant".
La première génération de canons sema l'épouvante, la deuxième démantela les châteaux forts et remparts, la troisième faucha les files d'infanterie. Cette gradation dans l'efficacité fut parallèle aux modifications de la vie sociale et de l'architecture, les châteaux forts furent abandonnés, les féodaux devinrent les courtisans des rois et des empereurs.
Durant des siècles, le canon fut le dernier argument du pouvoir.
S'il n'en est plus de même de nos jours et si l'artillerie ne tient plus la même place dans l'arsenal des grandes puissances, elle s'est profondément modifiée avec l'évolution des techniques qui elles-mêmes ont sensiblement progressé, grâce aux exigences des artilleurs.
C'est la raison pour laquelle l'histoire de l'artillerie est aussi, par un certain biais, l'histoire de notre civilisation industrielle.
Pièce d'artillerie de la fin du XVIe siècle avec attelage, pionniers et servants
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Gilbert SPOIDEN- Monuments à la mémoire du Bataillon COREE

Le 25 juin 1950, les communistes de la COREE du NORD attaquent la COREE du SUD et balayent les forces US du général WALKER.
L'ONU condamne l'agression et elle met une force expéditionnaire internationale à la disposition des défenseurs.
La Belgique crée, en août 1950, un bataillon d'infanterie fort de quelque 1.000 hommes. Quelques volontaires grands ducaux en font partie.
Le Corps de Volontaires pour la COREE (CVC) quitte ANVERS le 18 décembre 1950, à bord du bâtiment KAMINA et débarque à PUSAN le 31 janvier 1951. "Les Bérets bruns belges" sont placés sous la haute autorité du général Douglas MAC ARTHUR, commandant en chef des opérations et affectés à la 3e Div US. Ils sont conduits par le lieutenant-colonel A. CRAHAY (*).

(*) On peut lire, du Lieutenant Général er CRAHAY : "Les Belges en Corée - Historique du bataillon belge dans la guerre de Corée", Ed. La Renaissance du Livre, 1966 (épuisé), ainsi que "Les bérets bruns en Corée", Ed. J.-M. Collet, 1985 (livre de poche).

Dans un premier temps, ils mènent des actions de guérilla dans la région de WAEGWAN, puis, à côté de la 29e brigade britannique, ils participent aux durs combats de l'IMJIN et de l'HANTAN-GANE face à la 63e Armée chinoise, avant de se retirer en bon ordre.
Le major MOREAU de MELEN, qui fut Ministre de la Justice (1948) et Ministre de la Défense Nationale (1950) et dont nous saluons la mémoire car il nous a quitté l'an dernier, victime d'une crise cardiaque au moment même où il rendait hommage en l'église Saint-Jacques à Liège au doyen RENSON nommé chanoine de la cathédrale, s'y illustra particulièrement à la tête d'une petite unité de chars du 7 Rgt US, le 23 avril 1951, et lors du passage de l'IMJIN le 4 août 1951.
L'armistice ne fut signé que le 27 juillet 1953 à PAN MUN JOM. Jusqu'à cette date, les combats furent intenses.
Le CVC, se conduisit vaillamment à "BROKEN ARROW" en octobre 1951 et à KOJAKKOL (fin 1951).
En février 1952, le lieutenant-colonel VIVARIO prend le commandement du bataillon. Les missions dévolues à celui-ci alternent en montées en ligne et missions de réserve. Rondes, patrouilles de reconnaissance et patrouilles de combat sont au menu quotidien.
Un an plus tard, c'est le lieutenant-colonel GATHY qui assure le commandement, lors de violents accrochages sur la position de CHATKOL.
Après le cessez-le-feu, le CVC remplit un rôle humanitaire d'aide aux populations et les derniers éléments ne rentreront au pays qu'en juin 1955. 3.587 Bérets bruns se portèrent volontaires pour la guerre de COREE. Parmi eux, il y avait 69 commandos brevetés. Le bataillon a déploré 105 morts et disparus ainsi que plusieurs centaines de blessés.
Pour rappeler aux générations futures que des volontaires belges sont allés combattre en Extrême-Orient pour éviter que cette guerre de COREE n'engendre un troisième conflit mondial et que le sang qu'ils y ont versé le fut pour la noble cause de la Paix, divers monuments ont été érigés dans les différentes provinces.
Ce sont :
le Monument national à WOLUWE-SAINT-PIERRE, square de COREE,
le Mémorial du 40e anniversaire du départ des premiers volontaires d'ANVERS, le 13 décembre 1950, à bord du KAMINA, quai n° 24,
le Monument de CHAUDFONTAINE, près du Syndicat d'Initiative,
le Monument de LEOPOLDSBURG, garnison où fut créé et entraîné le bataillon en 1950,
le Monument d'ATTERT/ARLON,
le Monument sur l'esplanade du Centre d'Instruction Commando à MARCHE-LES-DAMES, qui assura en 1950 l'instruction des futurs Bérets bruns,
le Monument de SINT-NIKLAAS, dans le parc de la ville,
le Monument de DIXMUIDE (Grauwe Broederstraat),
le Monument érigé à la mémoire du général-médecin Comte Albert GUERISSE, médecin du Bataillon COREE en 1950/1952, à SAINT-HUBERT, sa ville natale.
La section du HAINAUT de la Fraternelle du Corps des Volontaires pour la COREE met tout en oeuvre pour réunir les fonds nécessaires pour implanter un monument sur le site du SHAPE à CASTEAU, à proximité de la chapelle où chaque année est célébrée la mémoire des disparus du Régiment (compte n° 271-0363321-88 de ASBL FCVC - Section HAINAUT, rue Belle Hélène, 20, 7110 BOUSSOIT. Mentionner "Souscription Monument HAINAUT).
D'autres hommages à des Volontaires belges en COREE sont fréquemment rendus, comme en 1992 à l'Athénée Royal d'ARLON où, à la demande de la Fraternelle des Volontaires belges en COREE, une plaque rappelant le souvenir de Roger CORNETTE a été scellée sur le mémorial aux morts des anciens élèves, victimes des guerres 1914-1918 et 1940-1945. La cérémonie d'inauguration eut lieu lors de l'assemblée générale des anciens élèves, en présence de nombreux anciens du bataillon belge de COREE conduits par leurs présidents, national et provincial, et des délégations avec drapeaux des diverses associations patriotiques arlonaises. Avant le dépôt de gerbes, le Président de l'Association Royale des Anciens Elèves de l'Athénée d'ARLON, Monsieur A. ENSCH évoqua la mémoire de Roger CORNETTE, tué lors de la bataille de l'IMJIN, le 23 avril 1951, alors qu'il combattait dans les rangs des troupes des NATIONS UNIES.
CITATION
Le Bataillon Belge et le Corps de Volontaires Luxembourgeois pour la Corée (Détachement) des Forces des Nations Unies en Corée sont cités pour accomplissement exceptionnel de leurs missions et pour leur héroïsme remarquable dans leur action contre l'ennemi sur l'Imjin, près de Hantangang, en Corée, pendant la période du 20 au 26 avril 1951. Le Bataillon Belge et le Détachement Luxembourgeois ont infligé à l'ennemi des pertes trente fois supérieures aux leurs par leur action agressive et courageuse contre les Communistes chinois. Pendant cette période, des forces ennemies considérables, appuyées par le feu de mitrailleuses, de mortiers et d'artillerie, menèrent des assauts furieux et répétés contre les positions du Bataillon Belge et du Détachement Luxembourgeois, mais ceux-ci repoussèrent vaillamment et continuellement ces attaques fanatiques en infligeant des pertes considérables aux troupes ennemies. Lorsque les Communistes chinois parvinrent à occuper des positions menaçant les lignes de communication amies, les Belges et les Luxembourgeois lancèrent avec intrépidité des contre-attaques à la baïonnette. L'ennemi, surpris par la hardiesse de ces attaques, fut désorganisé et reflua en désordre. Sur ordre de l'autorité supérieure, le Bataillon Belge et le Détachement Luxembourgeois se replièrent finalement, évacuèrent leurs blessés, furent réapprovisionnés et demandèrent alors à être remis en ligne. Dès qu'ils furent remontés en ligne, des hordes d'infanterie et de cavalerie furent aperçues se déplaçant vers le Sud. Quand l'ennemi se fut suffisamment approché, les forces amies amenèrent sur lui un barrage écrasant de mortiers, avec un résultat si dévastateur que le secteur fut jonché de tués. Les Communistes chinois continuant à faire avancer un nombre sans cesse accru de troupes, les Belges et les Luxembourgeois livrèrent avec intrépidité et succès des combats retardateurs qui permirent le retrait méthodique des unités voisines avec un minimum de pertes en hommes et en matériel. Le Bataillon Belge et le Détachement Luxembourgeois déployèrent tant de bravoure, de résolution et d'esprit de corps en accomplissant leurs missions dans des circonstances extrêmement difficiles et hasardeuses qu'ils doivent être placés au-dessus d'autres unités ayant participé à l'action. L'héroïsme extraordinaire déployé par les membres de ces unités au cours de cette période fait rejaillir un grand honneur sur leur pays et sur eux-mêmes.
Par ordre du General VAN FLEET
Henry J. HODES
Major General, US Army
Chief of Staff
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Gilbert SPOIDEN- Le Commando d'ARTHUR

Qui entre par le Hesbain, est combattu l'endemain.(Adage liégeois)
Dans le mensuel "Coeurs belges" du 1er juillet 1945, nous avons relu l'extraordinaire histoire d'ARTHUR et de son fameux commando.
"Coeurs belges" a été fondé sous l'occupation allemande en 1942 et a été l'organe de la Résistance.
Dans son n° 13 du 1er juillet 1946, nous voyons comment s'est établi un maquis en pleine Hesbaye, région peu propice par sa configuration, à l'action clandestine, et pourtant ...
Dès 1941, Arthur DERWA, de BERGILERS, aidé des maréchaux des logis Charles BASTIN et Jean DOMINICY de la Brigade de Gendarmerie d'OREYE, se mettent en devoir de recueillir et de réparer les armes abandonnées par l'armée belge et de diffuser des tracts clandestins pour contrer l'action de propagande ennemie. Cette cellule dépend du mouvement de résistance "La Légion Belge".
En novembre 1942, les premiers réfractaires au travail forcé viennent chercher refuge auprès du petit groupe qui s'évertue à les répartir dans les fermes de la contrée. Bientôt l'idée de créer un commando d'hommes résolus germe dans l'esprit d'Arthur.
Une opération menée avec ARAMIS, responsable du secteur de Huy, permet de récupérer 22 pistolets dans une maison communale des environs de Tongres. Ces volontaires pour le commando, dont la solde mensuelle a été fixée à 800 francs, sont logés dans des bâtiments abandonnés, fermes ou maisons particulières. Le ravitaillement est assuré par des fermiers acquis à la cause de la Résistance. La cohésion du groupe repose sur une discipline de fer.
Début 1943, le commando compte 80 hommes décidés. La mission qui leur incombe est de faire la chasse aux traîtres, aux dénonciateurs et indicateurs de la GESTAPO. Le commando dénommé initialement "6e Troupe de Choc - 3e Compagnie (6 TC 3), devient la SPB (Section Punitive Belge), connue sous l'appellation plus familière "Groupe ZERO". Son rayon d'action comprend 21 villages hesbignons sis entre Liège et Waremme.
Ce maquis est un modèle d'organisation mais les Allemands ne tardent pas à s'inquiéter. Des allées et venues suspectes d'étrangers à la région leur sont signalées par des indicateurs. L'identité réelle du chef de commando est rapidement connue de l'ennemi qui met tout en oeuvre pour le capturer.
Le 9 décembre 1943, le commando mène une action à la clinique Joseph Wauters à Waremme, en vue de délivrer Paul FREMDER, un des leurs, prisonnier des Allemands. L'action échoue. Paul FREMDER est abattu par un gardien. La tentative a cependant impressionné très fortement la Gestapo. Les effectifs de la Feldgendarmerie sont renforcés, une section de gestapistes s'installe à Waremme et une nouvelle brigade est créée à Fexhe.
Les patrouilles allemandes s'intensifient mais leurs passages sont signalés à ARTHUR par des sympathisants. Des accrochages avec les feldgendarmes et les gestapistes deviennent fréquents. ARTHUR pousse l'audace jusqu'à se promener de jour dans son domaine, armé jusqu'aux dents.
Le 16 juin 1944, voulant délivrer deux membres de son commando capturés par les feldgendarmes, ARTHUR réunit une vingtaine d'hommes et, à vélo, le groupe rejoint les Allemands et leurs prisonniers à LAMINE, où la bagarre éclate, autour de l'église et du cimetière. Malheureusement, des renforts ennemis affluent et le groupe ZER0 va se retrouver à 1 contre 10. Mais leur fusil-mitrailleur fait du bon boulot en tir de flanquement !
Grâce aux blés très hauts, les maquisards se replient. L'ennemi, très meurtri, manque de mordant. Il compte 17 morts et une vingtaine de blessés sur 200 soldats alignés.
Les maquisards dénombrent 7 manquants. Parmi eux, BEAUPAIN Albert, de Stavelot, DEHASQUE Jules, de Saint-Nicolas, DOSERAY Sébastien de Beyne-Heusay et BELLEVILLE Jules, d'Anthisnes, sont morts au combat.
Après cet affrontement sanglant, les Allemands s'emploient à resserrer leur surveillance : il leur faut Arthur DERWA, mort ou vif. Connaissant les moindres recoins de sa région, ARTHUR échappe aux Allemands qui l'encerclent un jour dans un café à CRISNEE, mais il parvient à s'enfuir à travers champs.
Les secrets de l'organisation du groupe ZERO sont bien gardés. Plutôt que de dévoiler quoi que ce soit, Guillaume QUAEDVLIEG de Plombières se laisse torturer, endure stoïquement tous les sévices que lui fait subir la Gestapo, mais il ne parlera pas. Il reviendra de BUCHENWALD dans un piteux état mais fier d'avoir tout enduré sans faillir à son devoir.
Raymond LEPOUSE, plutôt que de fournir des indications sur son groupe, se précipite du 2e étage de la Kommandantur de Liège et s'écrase sur le sol (*). Les Allemands, excédés des activités terroristes qui se multiplient de jour en jour, décident l'anéantissement du commando d'ARTHUR. Trois cents soldats sont affectés à cette tâche. Village après village, tout est passé au peigne fin. Mais le groupe ZERO se déplace de nuit et les Allemands rentrent chaque fois bredouilles. Ils n'ont pas assez d'effectifs pour isoler tout le secteur !

(*) Voir ci-après la photo de la plaque commémorative dédiée à Raymond LEPOUSE, apposée sur la façade du palais des Princes-Evêques à Liège.

Depuis mai 1944, les Maquisards sont dans l'attente du débarquement. Quand il survient, les énergies sont décuplées. Les sabotages se multiplient. De nouvelles armes sont réceptionnées.
Lors de la retraite des troupes allemandes, signalons les combats de MOMALLE (7/9/44), de STREEL (5/9/44). Plusieurs résistants du groupe y perdirent la vie. Citons MASSART Albert, de Namur, DELHALLE Jean-Louis de Liège, KNAEPEN Alphonse de Geets-Bets, LINCHET Henri, de F1awinne, DETHIER Edmond d'Oreye, DESSART Maurice de Saint-Nicolas.
Honneur aux vaillants maquisards de Hesbaye, aux héros du groupe ZERO, aux héros du groupe OTARIE, dont l'histoire vous sera racontée dans un prochain bulletin, aux habitants qui ont tout risqué pour les aider.
Cinquante ans après l'installation de la première cellule de résistance en Hesbaye, notre revue s'est fait un devoir de rappeler l'essentiel des faits d'armes de ces braves qui n'acceptèrent pas l'oppression et se dressèrent fièrement devant l'envahisseur.
HOMMAGE A RAYMOND LEPOUSE
Le 7 mai 1993, des anciens Résistants membres de l'Armée secrète et du groupe ZERO se sont retrouvés, place du Pilori, le long du palais des Princes-Evêques de Liège, devant la plaque commémorative dédiée à Raymond LEPOUSE.
Ils ont rendu hommage à ce Résistant arrêté en 1944 par les Allemands. Interrogé dans les locaux de la Kommandantur, au deuxième étage du palais, le 20 juillet 1944, Raymond LEPOUSE, les mains liées dans le dos, s'est précipité par la fenêtre pour ne pas révéler le nom de ses compagnons. Il est mort le lendemain.
Il était agent des Intercommunaux Liégeois.
Source : Journal La Meuse du 12 mai 1993
La plaque commémorative apposée sur la façade du palais
* * *
En complément de l'article ci-dessus, nous jugeons utile de reproduire deux textes relevés dans la revue trimestrielle n° 28, de mars 1992, de l'Association belge des Jeunes pour le Souvenir des deux Guerres.
LA RESISTANCE EN BELGIQUE
"Dès après l'invasion allemande, en 1940, des patriotes issus du nord comme du sud du pays se dressèrent contre l'occupant.
"Néerlandophones et francophones combattirent afin de préserver les valeurs qu'ils considéraient comme inhérentes à 1a civilisation.
"Dans l'ensemble du pays, les actions se multiplièrent et furent coordonnées afin de rendre la lutte plus efficace.
"C'est ainsi que se créèrent les divers mouvements de résistance qui se structurèrent et portèrent des coups très durs aux forces occupantes.
"Dans les rangs de 1a Résistance, les pertes furent malheureusement fort nombreuses.
"La Gestapo, aidée dans sa traque aux Résistants par des individus sans scrupule qui se montraient bien souvent plus cruels que leurs maîtres, mena une guerre sans merci contre ceux de nos compatriotes qui osèrent s'opposer à leurs sinistres desseins.
"Des milliers et des milliers de Résistants furent condamnés par les tribunaux allemands.
"Les conditions de détention furent telles qu'elles excluaient, non seulement l'oubli, mais même le pardon.
"La technicité moderne qui devrait être destinée à 1'amélioration de la condition humaine servit, au contraire, à créer des raffinements de cruauté qui furent utilisés afin d'augmenter les souffrances de ceux qui, dans les camps de concentration ou dans les prisons nazies, subissaient les sévices de leurs geôliers.
"Les survivants de cette lutte clandestine ne peuvent oublier les longues années de ce combat qui marqua leur vie à jamais. Ils ne peuvent également oublier le sang versé et 1a disparition de tant de leurs frères de combat.
"Puissent les générations qui suivent se souvenir du combat mené par leurs aînés et faire en sorte que l'humanité ne connaisse plus la dictature et des régimes faisant fi des règles les plus élémentaires de 1a démocratie.
Texte : Comité d'Action de la Résistance.
GROUPEMENTS CONSTITUANTS
RESISTANCE ARMEE : les Affranchis, 1'Armée de la Libération, 1'Armée Secrète, le Groupement Généra1 de Sabotage "G", les Insoumis, 1a Kempische Legioen, L. 100, les Milices Patriotiques du FT, le Mouvement National Belge, l'Organisation Militaire Be1ge de 1a Résistance, 1e Service "D", la Witte Brigade "Fidelio", les Partisans Armés.
PRESSE CLANDESTINE : L'Union Nationale de 1a Presse Clandestine, la Fédération Nationale des Journaux Clandestins du FI.
RESISTANCE CIVILE : Le Front de l'Indépendance, 1a Confédération Nationale des Résistants Civils de Belgique qui comprend en outre la Fraternelle Nationale des Isolés de 1a Résistance.
LA PRESSE CLANDESTINE
"La Presse Clandestine occupe une grande place dans la Résistance belge; son rôle primordial est confirmé par l'importance de la répression de l'occupant à son égard.
"Dès 1e 15 juin 1940, les premiers tracts furent distribués par des volontaires désireux de soutenir 1e moral de leurs compatriotes et de s'élever contre les nouvelles tendancieuses ou fausses diffusées par ce qui était devenu la presse officielle.
"Les premiers numéros clandestins furent imprimés avec des moyens rudimentaires, ensuite aussi par des résistants imprimeurs.
"Ceux-ci, ainsi que les distributeurs risquaient, soit par une dénonciation, soit au cours d'un contrôle, leur propre liberté, c'est-à-dire non seulement l'incarcération mais en outre les tortures et la déportation.
"12.128 ont été reconnus comme Résistants par la Presse Clandestine, dont un tiers à titre posthume.
"674 journaux clandestins différents permirent à la population de garder l'espoir en des jours meilleurs et en la victoire finale.
"Saluons avec respect et émotion tous ceux qui firent don de leur vie pour notre liberté."
G. S.
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Epinglé pour vous

1. La conservation du sang
On doit au professeur belge, le docteur en chirurgie Albert HUSTIN (1882-1967), l'une des découvertes médicales les plus importantes des temps modernes : la conservation du sang sous forme de sang gluco-citraté.
Le professeur HUSTIN a donné son nom au Centre d'immunologie - transfusion de l'Hôpital Universitaire Saint-Pierre, rue Haute, 232, à 1000 BRUXELLES.
La première transfusion sanguine digne de ce nom - des essais avaient déjà été tentés à partir de 1650, mais il fallut attendre 1900 et les travaux de l'Américain d'origine autrichienne LANDSTEINER pour venir à bout des incompatibilités sanguines - eut lieu, à l'intervention du Professeur HUSTIN, le 27 mars 1914, et elle réussit grâce au sang citraté et aux tests de compatibilité.
Cette technique va permettre de sauver de nombreuses vies humaines, durant la première guerre mondiale, les armées belligérantes utilisant la solution citratée dont la publicité avait été faite à travers le monde grâce à l'INDEX MEDICUS.
Référence : TOURING-SECOURS n° 3 du 4 février 1993.
G. S.
2. La pénicilline et les sulfamides
Si le sang citraté fut la trouvaille utilisée pendant la guerre de 1914-1918 qui sauva d'innombrables vies humaines, on peut dire que, pendant la Deuxième Guerre Mondiale, la pénicilline et les sulfamides ont eu un rôle au moins aussi important pour les combattants de tous les camps. Dans les deux cas, ces découvertes furent exploitées et développées parallèlement au bénéfice de tous.
Lisons ce qu'en disait, à la Libération, le magazine VOIR n° 32 :
"La PENICILINE ... Le monde entier connaît son nom. D'abord réservée aux hommes blessés en combattant, elle a atteint maintenant un stade de production suffisamment avancé pour être mise à 1a disposition des populations civiles. Déjà en vente en Amérique, elle le sera bientôt en Angleterre, en France, partout ou on en aura besoin pour lutter contre la maladie, rendue plus dangereuse par les méfaits de la guerre ... "
C'est en 1928 que le bactériologiste britannique Alexander FLEMING découvrit accidentellement la pénicilline sous la forme d'une moisissure vivante qui produisait un antibiotique. Mais ce n'est qu'en 1940 que le médecin FLOREY et le chimiste CHAIN réussirent à la stabiliser. Elle devint le "médicament miracle" qu'espérait le monde médical. En 1945, FLEMING, FLOREY et CHAIM reçurent tous trois le prix Nobel de médecine.
Efficace contre le staphylocoque, le microbe dont l'accumulation constitue le pus, contre l'ostéomyélite, cette dégénérescence des os qui suit souvent une blessure et provoque un empoisonnement du sang, souvent fatal, contre toute une gamme de maladies graves comme la méningite, la pneumonie, la péritonite, la syphilis ..., son pouvoir reconstituant n'est pas moins précieux. Si en effet une injection de pénicilline est faite à un blesse, la fièvre tombe immédiatement, l'appétit revient, la cicatrisation des plaies est considérablement hâtée. Tout cela permet de recourir à opération chirurgicale plus vite et dans de meilleures conditions. Au contraire des sulfamides, la pénicilline est pratiquement inoffensive pour les tissus sains.
"Les SULFAMIDES. Dès avant la guerre, la famille de drogues classées sous 1e nom de "sulfas" avait commencé un rôle important en médecine dans la lutte contre les infections. Depuis le début des hostilités, leur emploi n`a fait que se développer et se continuera sans aucun doute, leur champ d'action étant différent de celui de la pénicilline."
Actuellement chaque soldat a11ié engagé dans un secteur de combat est pourvu d'une enveloppe contenant de la poudre de sulfanilamide et de 12 comprimés, soit de sulfanilamide, soit de sulfadiazène. Est-i1 blessé ? Soit par ses propres moyens, soit avec l'aide d'un camarade, i1 verse la poudre sur la plaie et avale les comprimés à raison de deux chaque cinq minutes. Dans la plupart des cas, l'infection est arrêtée net.
Un autre domaine dans lequel l'emploi des sulfas a donné des résultats vraiment miraculeux est celui des brûlures, si fréquentes chez les aviateurs ou les hommes des formations motorisées, notamment des chars (...)."
Références : VOIR n° 32 et "Les Inventions qui ont changé le Monde", Ed. Sélection du Reader's Digest, 1933, P. B.
3. De Jean TOUSSEUL, dans "Le CAHIER de François STENON"
L'année 1813
L'année 1813 fut assez pénible (...)
On appelait déjà les conscrits de 1814 et 1815. Quelques-uns d'entre eux partirent pour la guerre; les autres se cachèrent dans les bois; en Flandre, au mois d'avril, les jeunes gens avaient blessé les gendarmes et détruit les listes de recrutement. On réquisitionna des ouvriers pour les travaux de fortification du Rhin.
On attendait une nouvelle guerre (...) Le colporteur vint nous annoncer les victoires de Bonaparte à Lützen, à Bautzen et à Wurschen. Mais son visage était plus gris que d'ordinaire : - "Douze mille Français sont morts à Lützen", disait-il. "Comment voulez-vous que les pauvres enfants de vingt ans qu'on vient d'incorporer ne se fassent pas tuer ?
Puis dès 1e mois de juin, on parla de 1a paix (...)
Nous n'eûmes plus de nouvelles, nous ignorâmes pendant deux mois que Bonaparte, vaincu à Leipzig, avait laissé plus de cinquante mille soldats français sur le champ de bataille. Une dizaine de jours après la Toussaint, Léonard Mottet nous dit en passant que l'empereur avait repassé le Rhin et que le typhus décimait son armée. I1 ajouta pourtant : "Mes Gens, les Cosaques arriveront bientôt chez nous" (...)
G. S.
4. La ligne de chemin de fer LIBRAMONT -BASTOGNE et ses tribulations
La Société nationale des Chemins de Fer envisage sérieusement de supprimer la ligne de chemin de fer reliant LIBRAM0NT à BASTOGNE. C'est le souhait des auteurs du plan de rationalisation de la SNCB.
Cette ligne n° 165 est riche de souvenirs.
Vers 1345, l'Empire britannique cherchait à améliorer l'acheminement de son courrier postal à destination des INDES qui venaient d'être conquises. Il avait besoin d'une voie ferrée reliant Ostende au port de Trieste via la ville de Luxembourg. C'est dans ce but que fut fondée en 1346, avec des capitaux anglais, la GRANDE COMPAGNIE du LUXEMBOURG (GCL), société privée. La liaison ferroviaire NAMUR - LUXEMBOURG (ligne 162) put ainsi voir le jour et être inaugurée en 1358. La vitesse horaire à l'époque n'excédait pas 50 Km à l'heure sur ce tronçon.
Le plus important courrier du monde pouvait dès lors être acheminé par cette voie jusqu'à LUXEMBOURG. Pour augmenter le rendement de la ligne, la GCL construisit alors certains embranchements à la dorsale 152 : la ligne de l'OURTHE (LIEGE - MARLOIE), n° 43, et la ligne LIBRAMONT - BASTOGNE, n° 155, qui fut inaugurée le 13 novembre 1869. Cette ligne était longue de 29 Km et comptait cinq gares et trois points d'arrêt : OURT (PA) - BERNIMONT - WIDEUMONT - ROSIERES - MORHET (PA) - SIBRET - VILLEROUX (PA) et BASTOGNE SUD.
Photo
En 1871, la MALLE DES INDES ne fit plus escale à OSTENDE mais à CALAIS et l'intérêt des Britanniques pour les lignes du Luxembourg faiblit, ce qui engagea l'Etat belge à les reprendre à son compte en 1873.
La Belgique prolongea la ligne 165 jusqu'à GOUVY (1885), puis jusqu'à WILTZ au Grand Duché en 1889, créant sur cette nouvelle partie une nouvelle gare à BASTOGNE NORD, à proximité du Petit Séminaire et de la caserne Heintz.
En 1916, la ligne LI BRAMONT – BASTOGNE – GOUVY est portée à deux voies par les Allemands qui mettent au travail, à cet effet, des prisonniers russes. Elle devient de la sorte une voie stratégique reliant l'Allemagne au front de VERDUN selon l'axe GOUVY – BASTOGNE – LIBRAMONT - BERTRIX.
Ma mère, actuellement nonagénaire, se souvient de la construction de cette deuxième voie, du lourd trafic ferroviaire dans les deux sens, du passage de matériels militaires, de troupes fraîches allant vers le front, de troupes décimées rentrant au foyer, de trains de cadavres aussi ..., retournant en Allemagne pour y être inhumés.
Son employeur, le fermier HANSEN, de BERNIMONT, au reste fort inconscient, l'envoyait régulièrement, elle encore enfant, puiser dans les boîtes à essieux et dans les graisseurs de coussinets des wagons l'huile dont il avait un pressant besoin pour ses machines agricoles.
Cette vidange était effectuée de wagon à wagon, lorsque les trains étaient à l'arrêt à Bernimont, à l'aide d'une cuillère à café recourbée. L'opération, pour ne pas être trop hasardeuse, se faisait entre midi et treize heures, temps dont tiraient profit les convoyeurs pour se restaurer dans la gare proche de 150 m à peine.
Ces sabotages répétés du matériel ferroviaire allemand, dictés avant tout par des intérêts économiques, auraient pu tourner mal. Ma mère en frémit encore rien qu'en en parlant. Pendant qu'elle prélevait la précieuse huile de graissage, elle entendait, là, toutes proches, les voix gutturales des Prussiens qui, s'ils l'avaient surprise dans son humble besogne, l'auraient à coup sûr froidement abattue.
Après la guerre 14-18, le trafic voyageurs peu intense amena la SNCB à supprimer la deuxième voie, en 1936.
Progressivement la ligne perdit tout intérêt; une ligne d'autobus de la SNCV fut ouverte entre LIBRAM0NT et BASTOGNE, BASTOGNE et BENONCHAMPS, BASTOGNE et GOUVY. BASTOGNE risque à brève échéance d'être coupé du réseau ferroviaire belge et l'on peut certainement le regretter pour nos amis des Ardennes. La date de la suppression de la ligne a été fixée au 22 mai 1993.
Une page aux souvenirs de la guerre 40-45 pourrait aussi être écrite autour de la ligne GOUVY – BASTOGNE - LIBRAMONT et de la ligne KAUTENBACH - WILTZ - BASTOGNE, mais les combats qu'elles connurent lors de l'offensive von RUNDSTEDT feront l'objet d'un prochain article.
Les souvenirs que nos lecteurs pourraient nous communiquer au sujet de ces voies ferrées en 1944-1945 sont les bienvenus.
G. S.
5. Le sac de HERON par le troupes françaises (1692)
Louis XIV, roi de France, déclara la guerre à l'Empire, le 14 septembre 1688. Les troupes françaises envahirent le Palatinat et le ravagèrent.
Début décembre 1688, les Français commencèrent les hostilités contre la Hollande. La déclaration de guerre, datée du 26 novembre, fut immédiatement notifiée aux Etats Généraux qui y répondirent, le 9 mars 1689, par une contre-déclaration de guerre.
En avril 1689, les troupes françaises occupaient les électorats de Cologne, de Mayence, de Trèves et le Palatinat, ainsi que les évêchés de Spire et de Worms.
L'Empire déclara la guerre à la France et obligea tous les princes à y prendre part. Le 12 mai suivant se conclut à Vienne la grande alliance de l'Empire, de l'Espagne, de l'Angleterre et de la Hollande contre la France, qui se trouva sans alliés. Dans ces circonstances, le Prince-Evêque de Liège ne put rester neutre et il se rangea du côté de l'Empire.
C'est ainsi que, de 1689 à 1695, les troupes françaises ravagèrent la Hesbaye.
En 1692, HERON fut mis à sac. L'église fut pillée et ravagée. Les objets du culte, des ornements ainsi que les registres paroissiaux furent emportés par les Français. Les Alliés, ayant mis le siège devant Namur, le 3 juillet 1695, s'en emparèrent le 4 août; le fort dut se rendre le 3 septembre (voir aussi notre rubrique "Bibliographie" du bulletin d'information précédent : "A la Sainte-Catherine" de Jean Culot).
La petite armée de la Principauté de Liège, forte de 6.000 hommes prit part au siège et à la prise de Namur.
C'est pendant ce siège que furent détruits les registres de la cure de Héron.
Traduction de la note en latin se trouvant sur le premier registre existant de nos jours.
"Le registre des baptêmes, des mariages et des décès commence en l'année 1696. Les registres précédents celui-ci furent emportés par les Français et perdus en 1692, pendant le siège de la ville de Namur. De même que les cloches de notre église de Héron. Tous les vitraux de la dite église ont été brisés et beaucoup d'ornements perdus. Quel malheur ..."
Source : "A la recherche du passé de Héron" par Jean JAMART.
G. S.
6. La restructuration de la Force Terrestre.
En 1993 :
Dissolution :
8 Li/9 Li, 13 Li, 3 A, 13 A, 20 A, 13 Cie TTr
Déménagement :
255 Cie Maint Lt Avn (Bierset).
En 1994 :
Dissolution :
QC 4 Bde, 3 Ch .A, 6 Li, 2 Ch, 1Cie ESR/CVP
4 L.
18 RA, 19 A Ch, 35 A, 43 A (2), 62 A
15 Cie Gn, Det 6 Gn.
Staf 18 Bn Log, 93 Bn Log.
101 Cie Rav, 109 Cie Rav, 106 Cie Rav/Tpt
4, 200, 202 Cie Mat
261 Cie Mun, 934 Dep Mun, 935 Dep Mun, Reg Mun Dep (Lens, Zonhoven)
Dep Mun C Log 5
95 Cie Maint Hawk, Det Log Instr et Sp AA
HM Soest
EM Gpt Instr Base OC/CI : 1, 2, 3, 4
Déménagement :
1 JP et ETBl Gp CVRT : Leopoldsburg
Esc 4 Ch Ch : Spich
Cie 1 Gn : Burcht
14 Cie Gn Para Cdo : Heverlee
17 Esc Lt Avn (Bn HATk) : Bierset (1)

(1) Si infra disponible, également déménagement

17 Cie Mat et 17 Cie Med : Spich
210 Cie Log Para Cdo et 16 Cie Med Para Cdo : Heverlee
17 Cie Rav Tpt : Altenrath
231 Cie Maint (RITA) : Vilvoorde.
260 Cie Mun : Bertrix
Fusionnement :
2 Cy - EI : Stokem, Arlon.
1 G - 2 G - ETBl : Leopoldsburg
6 A - EAC : Brasschaat.
6 TTr - CTrE : Peutie.
17 RA - 18 RA - 19 A Ch : Altenrath
C Log 2 - As Mat : Haasdonk
EAA - 14 A : Niewpoort (Bn Mistral) (2)

(2) A confirmer.

Source : FORUM Retour au sommaire

Le courrier des Lecteurs

UN COMBATTANT DE 14-18.
Monsieur André FRANCART nous envoie la notice biographique de son oncle, Monsieur Eugène MERTENS (1893-1967). Il faut noter la volonté et le patriotisme qui animait ce combattant de la Position Fortifiée de Namur en 1914.
"En hommage à tous ces braves, pour qu'ils ne restent pas dans l'oubli.
"En souvenir de ce membre de notre famille, qui aurait eu 100 ans ce 4 juin 1993, nous avons l'honneur de présenter sa notice biographique militaire qui mérite d'être publiée."
Renseignements militaires
Milicien de 1913, incorporé à 1a Position Fortifiée de Namur, 1e 15-9-13, Fort de Suarlée, matricule 7774. A suivi les cours de 1'école régimentaire et est nommé brigadier, au début de 1914, au même fort.
En service actif à la déclaration de 1a guerre, a assisté aux opérations du Fort de Suar1ée, en août 1914, et a subi le bombardement intense de la grosse artillerie allemande et autrichienne qui réduisit l'ouvrage au silence et à la reddition.
Fait prisonnier par l'ennemi, s'est évadé après plusieurs jours de captivité et a rejoint l'armée à Anvers, en septembre 1914, après avoir traversé les territoires occupés.
A Anvers, il a été dirigé sur le Fort de Ste-Anne (Dépôt) pour être rééquipé et i1 attend son transfert sur une unité définitive lorsque survient la retraite. Parti avec les dernières unités du Réduit National, une fraction de 1a colonne dont il fait partie est cernée à La Clinge (frontière hollandaise), 1'ennemi ayant touché les frontière entre ce village et Selzaete). Plutôt que de se laisser prendre une seconde fois par les Allemands ou se faire interner par les Ho11andais, il se procure des vêtements civils, pénètre en Hollande, contourne le point frontière de Lendelede. Il se procure quelques bribes d'uniforme et continue alors la retraite avec la queue de l'armée.
L'artillerie de forteresse étant dissoute par la prise d'Anvers, il est dirigé sur Calais, avec tous les hommes de cette arme, pour être rééquipé.
Versé dans une compagnie de fusiliers, i1 est dirigé ensuite sur le front et passe au 2e Bataillon du 11e de Ligne en qualité de signaleur. Participe aux opérations de tranchée avec ce régiment pendant 7 mois et est réc1amé ensuite par l'artillerie qui le verse à 1a 42e Batterie du 3e Régiment d'Artillerie de campagne. On lui confie le poste de pointeur à une pièce et i1 participe alors aux opérations de sa nouvelle unité, dont les séjours sur la ligne de feu atteignent parfois 6 mois sans repos.
Est nommé maréchal des logis en 1916 (matricule 5401).
A participé aux combats de Merckem, Stademberg, La Lys, canal de dérivation de la Lys, et à toute l'offensive libératrice.
* * *
A été cité à l'ordre du jour de 1a P.F.N. (brigade) en date du 21-9-22 "Pour le courage et le dévouement dont il a fait preuve pendant le bombardement du fort de Suarlée, cité à l'OJA." Cette citation entraîne le port de la Croix de Guerre avec attribution d'un lion en argent.
A obtenu la Croix de Guerre avec palme, à 1a date du 11 mars 1919, comme suite à 1'Arrêté Royal du 27 octobre 1921 n° 10.175.
"S'est évadé des territoires occupés par l'ennemi et s'est distingué par son courage et son dévouement au cours de sa présence à 1'armée de campagne."
Outre ces deux Croix de Guerre, i1 obtint : la Médaille Commémorative, 1a Médai1le de la Victoire, la Décoration Militaire de 2e classe (ancienneté), et la Croix de Feu.
* * *
De plus, le maréchal des logis MERTENS Eugène - O. - V, a été nommé Chevalier de l'Ordre de la Couronne avec Glaives, le 21 juillet 1949 et a reçu la Croix de Chevalier de l'Ordre de Léopold avec Glaives le 20 juillet 1959.
Monsieur FRANCART a joint les brevets des Citations et Décorations mais la place nous manque pour les reproduire.
Constatons cependant que son oncle ne s'est pas contenté d'un rôle passif pendant la Deuxième ;Guerre Mondiale, puisque la qualité de résistant armé lui a été reconnue le 22 mars 1940.
Monsieur Eugène MERTENS a également reçu, le 19 octobre 1950, un diplôme d'Honneur, avec attribution de la Croix d'honneur, comme membre dévoué de la F.N.C., section de Marcinelle, à titre de reconnaissance pour les services rendus à la Fédération Nationale des Combattants de Belgique.
PREMIER MAI 1943 - IL Y A 50 ANS
Monsieur Jules LOXHAY nous remet deux journaux clandestins, l'un, daté d'avril 1943 a pour titre "Pauvre et honnête - LE PEUPLE", l'autre, portant le n° 70 - Spécial mai 1943, est un exemplaire du " Courage - Confiance - LE MONDE DU TRAVAIL". Que se passait-il il y a 50 ans et que pensaient la plupart de nos contemporains ?
Du premier, Le PEUPLE, nous extrayons de "La Petite Chronique de la Déportation" :
- "A 1a gare d'Angleur, un convoi de déportés va partir. Un rexiste en uniforme est très entouré. Approchons-nous. Il change des marks contre de 1'argent belge. A un taux usuraire, évidemment ..."
- "Un train de déportés français traverse la banlieue. Sur les voitures, on a inscrit à la craie : "A bas Pétain", "Laval au poteau", "Vive De Gaulle" et autres compliments à l'adresse des nazis. Les déportés saluent le poing fermé."
- "Un garçon de café est appelé à la Werbestelle. Il est porté "Bon pour le travail en Allemagne". Sur sa fiche de destination est inscrit "Garçon de restaurant à X ... Peut loger en ville. Nourri au restaurant."
Rassuré, il part. Huit jours après, son épouse reçoit des nouvelles. Il est bien à X, mais i1 tourne des obus, mange à la gamelle et dort dans des baraquements en bois !"
Du second, LE "MONDE DU TRAVAIL, nous copions quelques "Echos et Nouvelles" :
- "Le "fair-play" des nazis. Liège et toute la province connaissent une période "agitée". Sans interruption, du matin au soir, les Fritz arrêtent tous les passants, exigent les cartes d'identité, fouillent, arrêtent les tramways, les vélos, pénètrent dans les maisons, cernent tout un quartier et emmènent les "douteux". Certains sont expédiés en Allemagne Manu militari" et sans revoir les leurs. Que cherchent-ils ? Des parachutistes, des porteurs d'armes, des voleurs de timbres, des clandestins, des hommes qui se soustraient à la déportation ? ... Probablement tout à la fois. Nous connaissons les "beautés de : ON = Ordre Nouveau). Quand donc pourrons-nous leur rendre leurs "gentillesses"
- "La navigation interrompue sur la Dendre. Un admirable exploit vient d'être commis par les partisans, dans la nuit du 27 au 28 mars, à Lessines, Un barrage sur la Dendre a été dynamité. La rivière est à sec entre Lessines et Pafignies, soit près de 5 kilomètres. Les péniches, au nombre de 15, remplies de produits des carrières, qui se trouvaient sur ce tronçon, sont toutes échouées. Le trafic fluvial sera interrompu assez longtemps. C'est vraiment du beau travail.
Les Allemands qui étaient venus enquêter le dimanche, eurent de plus la désagréable surprise de trouver, leur travail terminé, les quatre pneus de leur voiture coupés et inutilisables."
UN COURRIER DU MUSEE DE SILESIE OPAVA
Nous avons reçu une lettre du Musée Régional de SILESIE OPAVA - Section des Fortifications et des Arts martiaux nous signalant l'existence dans la petite ville de Hlucin - Darkovicki, près d'OSTRAVA, d'un Musée de la Fortification tchécoslovaque représentant les différents types de forteresses élevées pour la défense de la Tchécoslovaquie dans la deuxième moitié des années 1939 et principalement une forteresse d'infanterie, nommée ALEJ, avec deux cloches blindées d'un poids de 23 tonnes et une coupole de tir blindée d'un poids de 49 tonnes. Elle a été installée avec l'armement et l'équipement militaire de cette époque, un groupe électrogène, une ventilation filtrante, un central téléphonique et un puits de 47 m de profondeur.
Pour tous renseignements, s'adresser à PhDr. Jaromir Matysek, Chef de Section des Fortifications et des Arts martiaux, Musée régional de Silésie Opava, 702 00 Ostrava 1 - Privoz, Palackého 23, téléphone 069/215-?45.
INAUGURATION DU MONUMENT AUX MORTS DU 20 A, A EBEN-EMAEL
Nous lisons dans le journal "La Meuse" du 29 mai 1993 qu'un monument en hommage aux soldats du 20e Bataillon d'Artillerie vient d'être érigé près de l'entrée du fort d'Eben-Emael. Il a été inauguré le 25 mai par le plus ancien chef de corps du 20 A, le colonel Schmitz. Le monument porte l'insigne du 20 A, une plaquette donnant les noms des militaires tombés en 1940, aux alentours d'Eben-Emael, et une autre donnant le dispositif du bataillon.
Rappelons que l'action de l'artillerie de campagne (et particulièrement du 20 A), le 10 mai 1940, sur le Canal Albert, a été étudiée par Joseph THONUS dans le bulletin du C.L.H.A.M. Tome IV, fasc. 9 de Mars 1991.
LE 10 MAI 1940 A EUPEN
Monsieur Robert LAFFALIZE, d'Aywaille, nous fait le récit des premiers jours de la guerre vécus dans une ville des anciens "cantons rédimés".
"Travaillant à la construction du barrage à EUPEN, j'y étais domicilié depuis juin 1939 à 1a Haasstrasse, dans la ville basse. La vie dans le quartier était calme, sans polémique (1).

(1) Contacté par téléphone, Monsieur Laffalize nous a expliqué que, dés la fin de ses études, il avait rejoint à Eupen sa famille qui s'y était installée précédemment, le frère aîné du narrateur étant engagé comme mécanicien au barrage. Au premier jour de la guerre, le travail cessa. Cependant le chef de chantier, originaire de Malmédy, qui, dès l'entrée des Allemands en Belgique, avait arboré un brassard à l'emblème nazi, régla les salaires dus, dans les jours qui suivirent.

"Le 10 mai, vers 7 heures, 1e bruit d'une formation d'avions allemands volant à basse altitude nous réveille en sursaut. La radio de Bruxelles informe de l'agression des troupes allemandes. Tout est calme dans la rue et rien ne révèle un quelconque mouvement de troupes. Chez les proches voisins, c'est le choc.
"Vers 8 heures, la rue s'anime un peu mais sans manifestation de masse. Nous voyons passer un cycliste civil arborant un grand drapeau à croix gammée. Il se dirige à bonne allure vers la caserne toute proche. Peu après, retentit 1e claquement assourdi d'un coup de feu. C'est notre bonhomme qui vient de se faire abattre par la sentinelle qui était toujours en poste. Une quinzaine de soldats belges étaient toujours présents, les autres unités étant réparties le long de la frontière. Ce sont les policiers de la ville venus en parlementaires qui ont négocié leur capture. Ils sont alors repartis à pied, encadrés par les policiers eupennois. Tout cela se déroulant discrètement et sans violence apparente. Quant au cycliste, il eut droit à des obsèques officielles. Il était eupennois et travaillait comme jardinier à l'hôpital de la ville haute.
"En fin d'après-midi, je fus un témoin éloigné d'une ultime violence. Un homme s'enfuyant devant une demi-douzaine d'énergumènes fut jeté au sol, puis battu sauvagement. L'arrivée rapide d'un policier local stoppa l'action. La victime, après une longue récupération, s'en est reparti seul. J'ai appris qu'il aurait tenu des propos pro-belges au déplaisir de ses agresseurs.
"La journée s'est terminée sans avoir aperçu le moindre soldat allemand. "Dans les jours qui suivirent, le quartier a vécu dans un calme relatif. Pas de convois militaires, ni de manifestations pro-nazies.
"Le mark fut rapidement accepté dans les commerces. Les ménagères d'AIX, en grand nombre, venaient littéralement vider les merceries, achetant également beaucoup de savon et du chocolat.
"Les militaires que l'on croisait n'étaient manifestement pas en service. C'est par petits groupes qu'ils se rendaient à 1a pâtisserie voisine pour y "déguster", une cuillère à potage à la main, la crème fraîche généreusement servie dans des assiettes profondes.
"Un certain après-midi, le bruit a circulé du rétablissement, pour le lendemain, de l'ancienne frontière de 1914.
"Une paire d'heures plus tard, nous quittions la ville à quelques-uns pour rejoindre Verviers.
"Une longue aventure pleine d'émotions fortes et de drames était lancée. Je n'avais pas 17 ans". (2)

(2) Nous avons demandé à Monsieur Laffalize de nous conter quelques-unes de ses émotions de guerre. Comme tous les retraités, il est fort occupé mais nous espérons néanmoins qu'il fera un effort pour le C.L.H.A.M. et son bulletin.

LA CITADELLE DE LIEGE
La Citadelle de Liège appartient au passé. Elle fut démolie entre 1967 et 1973 pour faire place à l'hôpital du C.P.A.S., en remplacement de l'hôpital de Bavière, voué lui-même à la démolition.
Voici deux photos aériennes assez rare de cet ancien quartier militaire.
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Pierre BEAUJEAN- Les Projecteurs du Génie en 1914-1918

L'invention de la lampe à incandescence.
Le premier brevet fut déposé par l'Américain J. W. STARR en 1845 mais ce ne fut qu'en 1878 que l'Anglais Joseph SWAN put présenter une ampoule valable, grâce à l'invention (en 1865, par l'Allemand Herman SPRENGEL) de la pompe à vide à mercure. Jusqu'alors, en effet, les filaments de papier carbonisé qu'on employait se consumaient trop vite, faute d'un vide suffisant dans l'ampoule. En 1879, l'Américain EDISON, qui, parallèlement, faisait des recherches, parvint à garder allumée une ampoule pendant treize heures et demie.
En 1908, l'Américain W. C. COOLIDGE arriva à comprimer la poudre de tungstène, ce métal idéal, mais dur et cassant, pour en faire une baguette, puis un filament.
En 1913, l'Américain Irving LANGMUIR améliora le rendement en remplissant l'ampoule avec un gaz inerte, azote ou argon, et en inventant la lampe à filament bobiné où le fil de tungstène est enroulé en spires serrées.
Les projecteurs militaires
On peut lire dans la Revue du Génie Militaire de 1891 (Berger Levrault, Paris), dans l'article "Perfectionnements récents apportés aux procédés d'éclairage militaire", un "curieux détail" rapporté par des officiers prussiens qui participaient au siège de Paris en 1870, où la défense ne disposait cependant que d'appareils de puissance médiocre : "dès que les Allemands se voyaient éclairés, à 8 ou 10 Km de distance (?), ils se couchaient à plat ventre et restaient immobiles, n'osant pas même souffler". Et il est ajouté que "bien souvent, à l'avenir, il en sera ainsi, d'autant mieux qu'à plusieurs kilomètres de la portée efficace de l'appareil on peut encore très bien lire un journal et qu'on peut par suite craindre d'être vu".
Si l'on sait que la revue précitée décrit un système de commande à distance des projecteurs avec possibilité d'animation dans les deux sens, en azimut et en élévation et à deux vitesses, une rapide et une lente, avec arrêt instantané, on peut penser qu'en 1891 déjà, on était bien avancé dans les systèmes d'éclairage du champ de bataille et des zones à surveiller.
Les projecteurs du Génie de l'Armée belge
C'est en 1913 que, pour la première fois dans notre armée, une unité de Projecteurs fut créée : c'était une compagnie du Génie hautement spécialisée, rattachée au régiment caserné à Anvers.
Son matériel ne comprenait guère qu'un petit nombre de postes photoélectriques automobiles (trois) et quelques appareils hippomobiles surannés. En même temps se constituait dans chacune des positions fortifiées de Liège et de Namur, une compagnie mixte de Télégraphistes et Projecteurs, moins bien dotées encore en matériel photoélectrique.
Le début de la guerre - les Projecteurs dans la Position Fortifiée d'ANVERS
La guerre surpris les Projecteurs dans cet état de pénurie. Mais la compagnie d'ANVERS, opportunément renforcée par de nombreux engagés volontaires parmi lesquels des ingénieurs et des électriciens expérimentés, qui se mirent énergiquement au travail. La liste des réalisations qui lui furent confiées et qu'elle mena à bien avec des moyens de fortune est de nature à étonner.
I1 fallut d'abord procéder à la création de l'éclairage intérieur de la plupart des forts et redoutes; éclairage aussi de leur champ de tir.
On installa à cet effet des groupes électrogènes constitués au moyen des éléments que l'on put se procurer sur place, tels : moteurs d'automobiles accouplés à des dynamos réquisitionnées, locomobiles du type employé sur les champs de foire, etc.
Dans les forts de seconde ligne, le courant du réseau urbain fut amené par câble quand on le put, par lignes aériennes quand le câble vint à manquer; des postes de transformation furent installés de toutes pièces et des réseaux intérieurs construits.
Au point de vue de l'éclairage du terrain et de l'obstacle (flanquement), le problème était difficile à résoudre car les appareils projecteurs manquaient. On en réquisitionna un certain nombre à bord des navires en rade; après quoi, il fallut bien recourir à des solutions de fortune comme, par exemple la construction, dans des usines anversoises, de miroirs en cuivre repoussé et argenté qui équipèrent des projecteurs anti-aéronefs opérant contre les zeppelins.
Le peu de matériel fut affecté tout d'abord à la surveillance de l'Escaut. Plus tard, après le deuxième bombardement d'Anvers par zeppelin, un des appareils automobiles fut affecté à la défense aérienne et eut la chance de prendre dans son faisceau le seul zeppelin qui chercha encore à atteindre la ville, mais qui fit demi-tour dès qu'il se vit repéré.
Lorsque le siège d'Anvers fut commencé, deux projecteurs furent affectés au secteur d'attaque et occupèrent des positions successives.
La retraite d'ANVERS
Un incident de la retraite du détachement de ces deux projecteurs automobiles a été raconté par le général Pâris, alors lieutenant. Cette troupe, traversant Anvers bombardé, devait emprunter le pont militaire construit à l'aide de bateaux sur l'Escaut à hauteur du Steen. Arrivé à plus de 500 m de ce pont, le détachement se heurta à un encombrement indescriptible d'hommes, de femmes, d'enfants, de voitures à cheval, de voitures à bras, de brouettes, de vélos, de voitures d'enfants entremêlés à du charroi militaire, hippomobile et automobile (voir photo).
Impossible de se frayer un passage vers le pont militaire à travers la foule qu'il aurait fallu au moins deux jours pour transporter sur la rive gauche de l'Escaut au moyen de l'unique bateau faisant la navette entre le ponton du Steen et la Tête de Flandre. L'accès du pont militaire était en effet interdit aux civils.
De plus, la panique commençait à envahir la foule grouillante, car les Allemands allongeaient leur tir et les shrapnels éclataient déjà à hauteur de la Place Verte.
Il fallait sortir de cette situation : l'officier commandant le détachement de Projecteurs, le lieutenant Pâris, enfourcha un cheval et parvint à fendre la foule, à atteindre le pont de bateaux et à obtenir de l'officier commandant le pont, après une longue discussion, que celui-ci autorise le passage des civils. Il y mit cependant comme condition que les hommes des Projecteurs seraient répartis sur le pont pour assurer la surveillance et que le passage se ferait par petits groupes isolés, sous la direction de Pâris. C'est ainsi qu'un lieutenant des Projecteurs, à cheval, joua le rôle d'agent de la circulation pendant que ses hommes contrôlaient celle-ci.
En trois heures, le canal au Sucre et le ponton du Steen étaient dégagés et les Projecteurs purent à leur tour passer sur la rive gauche de l'Escaut. Là, le gros de la Compagnie se trouva réuni. Son commandant le mena successivement à Beveren, Kieldrecht, La Cleinge. Ordres et contre-ordres firent perdre un temps précieux et, finalement, cette troupe, comme bien d'autres, dut se résigner, la mort dans l'âme, à l'internement en Hollande; mais nombreux furent les hommes des Projecteurs, toujours débrouillards, qui rejoignirent par la suite l'armée belge sur l'Yser en trompant la surveillance hollandaise. (*)

(*) Dans les camps hollandais de Zeist, Harderwijk, Amersfoort et du Gasterland, étaient internés 25.000 hommes de l'armée d'Anvers, en vertu de l'article 10 de la Convention de La Haye.

Pendant les premières semaines, il fut possible à certains d'entre eux de tromper la vigilance des sentinelles hollandaises et de gagner en vêtements civils Flessingue et Rotterdam, où ils pouvaient s'embarquer pour aller rejoindre le front. Mais dans la suite, ils furent gardés très étroitement. Les officiers qui avaient refusé de donner leur parole étaient "bouclés" dans l'île d'Urk (référence : Nos Héros morts pour la Patrie, Edit. Van Der Elst, Brux. 1920).
Le Père Martial LEKEUX, officier d'artillerie, dont nous avons déjà parlé, est un de ceux qui, fait prisonnier malgré lui par les Hollandais, réussit à s'échapper au prix de grandes difficultés et à rejoindre le front (référence : Mes Cloîtres dans la Tempête).
D'autre part, un certain nombre d'officiers, sous-officiers et soldats, disséminés dans divers secteurs, parvinrent à se glisser le long de la frontière et à rejoindre l'armée de campagne à la côte. Il en fut de même d'un unique appareil automobile. Mais les Projecteurs, en tant qu'unité, cessèrent momentanément d'exister.
Renaissance des projecteurs
La guerre de tranchées s'organisant peu à peu, les défenseurs de celles-ci ressentirent la nécessité de disposer de moyens d'éclairage.
Les petits appareils donnèrent lieu à de multiples recherches. Les phares genre automobile, qui, à cette époque, fonctionnaient en général à l'acétylène, furent rejetés pour manque de puissance. Finalement, en 1915, on s'équipa de projecteurs de 15 cm à miroir de verre et lampe à incandescence à filament presque ponctuel, alimentés par une petite dynamo, mue à la main par un servant. Ce projecteur avait été conçu par un officier Français, le capitaine DESBRIERE et il était construit en série avec le concours d'une usine parisienne.
Cet appareil, pratique et robuste, qui donnait un faisceau peu ouvert, puissant, de portée satisfaisante (± 100 m), resta en service, sans modification sérieuse jusqu'à la fin de la guerre.
La recherche d'un appareil de puissance moyenne (ouverture 30 cm) fut aussi assez ardue. La portée demandée, 600 m contre un objectif "troupes", fit qu'il devait être électrique, comporter un bon miroir parabolique en verre et une lampe à arc réglable à la main.
La production de courant nécessitait un groupe électrogène suffisamment puissant pour fournir un courant de 10 ampères sous 80 volts, assez léger et assez peu volumineux pour pouvoir être transporté dans un terrain chaotique et même dans les tranchées. Le groupe BALLOT, à moteur monocylindrique à essence, qui fut retenu, pesait 130 kg. Sa forme et son poids faisaient que son transport dans les boyaux et sur les passerelles du front, était malaisé.
Quant aux projecteurs de grande puissance, qui ne devaient pas être installés en première ligne en terrain bouleversé, ils étaient portés ou remorqués par une voiture BERLIET qui contenait une dynamo actionnée au moment du besoin par le moteur de la voiture, et qui transportait le câble destiné à l'alimentation à distance du projecteur.
Ces appareils étaient de deux types : 60 cm, portés, et 90 cm, remorqués; miroir métallique doré, volet occultateur, lampe à arc automatique de 60 ou 80 ampères.
Il était prévu, en 1915, par Division d'Armée, un peloton de Projecteurs doté de 10 appareils de 15 cm, 3 appareils de 30 cm, et 2 appareils de 60 ou 90 cm.
Le premier noyau du personnel appelé à servir les projecteurs fut fourni par les éléments de l'ancienne Compagnie de Projecteurs de la Position Fortifiée d'Anvers qui avaient pu échapper à l'internement. Il fut renforcé par des apports nouveaux choisis dans les corps de troupes. Le critère utilisé était le métier exercé par chaque homme dans la vie civile : ingénieurs, contremaîtres, électriciens, mécaniciens, chauffeurs d'autos, opérateurs de cinéma, etc. De plus, un bon nombre d'officiers, sous-officiers et soldats de l'ancienne Compagnie, qui parvenaient à s'échapper des camps d'internement en Hollande, rejoignirent les unités nouvelles. Cette troupe ne tarda pas à être animée d'un esprit de corps très vif.
Les hommes du Génie ont conscience du caractère délicat des missions qui leur sont confiées; construire un pont, en faire sauter un autre, poser une voie ferrée, assurer les liaisons téléphoniques d'une armée sont des besognes qui exigent de l'intelligence et de la personnalité. Les détachements du Génie opèrent par petits paquets, les missions sont remplies souvent par trois ou quatre hommes avec un gradé, quelquefois par un homme tout seul. Cela développe, même chez le simple soldat, un sens aigu de l'initiative et de la responsabilité. Ces caractéristiques devaient se développer encore par les conditions dans lesquelles ces hommes allaient opérer sur le front.
Les projecteurs au front
Le premier petit groupe porteur de projecteurs de 15 cm fut dirigé d'urgence vers le front, au début de la bataille de STEENSTRAETE (22 avril 1915) où leur utilité fut telle que les fantassins, recevant dans la nuit la ruée de l'ennemi, criaient "lumière, lumière", chaque fois que la fatigue obligeant les servants à se relayer, les appareils faisaient, durant un court instant, mine de faiblir.
Au cours de l'été 1915, tous les pelotons avaient rejoint successivement leurs divisions.
Les projecteurs de 15 cm étaient naturellement placés aux avant-postes, endroits particulièrement périlleux et dépourvus de tout confort où un grand nombre de leurs servants sont tombés, mortellement frappés.
La ligne belge et la ligne allemande, souvent séparées l'une de l'autre par un assez grand espace de terrain inondé avaient, dès la fin de la bataille de l'Yser, poussé l'une vers l'autre une série d'avant-postes. Il y avait ainsi devant notre première ligne tout un chapelet de ces petits postes : dix ou douze fantassins, derrière une barrière de sacs, dans une ferme démolie, sur un petit tertre émergeant de l'inondation.
Souvent sans liaison directe avec le poste voisin, quelquefois soutenus, à cent mètres en arrière, par une grand-garde, ils se reliaient à la première ligne, soit par une route pavée, vestige de l'époque de paix, et qui, construite en remblai, dépassait encore le niveau des eaux, soit, le plus souvent, par des passerelles, quelques-unes longues de plus d'un kilomètre, qui enjambaient les prairies inondées.
A d'autres endroits, comme devant DIXMUDE, les Belges avaient leur première ligne sur la berge ouest de l'Yser, mais avaient jeté quelques postes avancés de l'autre côté du fleuve. On y accédait par un radeau que l'on hâlait d'une rive à l'autre.
Dans d'autres secteurs, enfin, les deux premières lignes étaient tangentes ou à peu près. Sur plusieurs kilomètres de long, les deux armées vivaient face à face, à cinquante mètres et quelquefois moins, l'une de l'autre; c'était le cas notamment, du célèbre "boyau de la mort".
A tous ces postes avancés, il n'était pas question d'accéder de jour. La moindre silhouette aperçue, le moindre bruit entendu, provoquait une fusillade, voire une lutte à coups de bombes.
A la nuit tombée, la relève des projecteurs partait du cantonnement, distant de 6 à 7 Km de la zone des tranchées. C'était la relève des hommes et non du matériel. Le petit projecteur de 15 et sa dynamo, une fois amenés au poste avancé, n'en bougeaient plus; ils n'étaient ramenés à l'atelier qu'en cas d'avarie. Il fallait, en effet, éviter de charger inutilement les hommes qui, en plus de leur mousqueton et de leur fourniment, emportaient leur nourriture pour 48 heures.
Aux avant-postes, toute la nuit, les deux servants du projecteur veilleront au côté des fantassins. Il n'est même pas question de se pelotonner dans un abri. C'est dehors qu'on monte la garde, à côté de l'appareil, prêt à le faire fonctionner au premier signe de l'officier ou du sous-officier qui commande le poste, sans fumer, en ne parlant souvent qu'à voix basse. Quant l'aube vient, et l'hiver, la nuit est interminable, on se glisse à quatre pattes dans des abris étriqués où moisit une paille humide et malpropre et on s'affale dans un lourd sommeil. Deux jours et deux nuits où on s'est nourri de pain, biscuits et conserves, et c'est le retour au cantonnement où l'on passe quatre jours à se nettoyer, s'épucer, à faire des corvées, des exercices. Au soir du quatrième jour, on remonte en ligne. Le cycle s'est déroulé ainsi, de secteur en secteur, pendant près de quatre ans, coupé de temps à autre par un incident plus ou moins grave : bombardement, lutte à coups de grenades, coups de main, fusillades ...
Cependant, les interventions d'éclairage des projecteurs se faisaient rares car il est compréhensible qu'en dehors des moments de combat et des attaques, les occupants des tranchées désiraient fort peu qu'un projecteur ne s'allume à côté d'eux et n'attire les pluies de balles et les obus.
Aussi, en 1916, la manoeuvre des projecteurs de 15 cm fut confiée à l'infanterie; chaque bataillon reçut une dotation de deux de ces appareils. Il faut ajouter que, les fusées éclairantes se perfectionnant, leur usage se répandit et réduisit le rôle des projecteurs.
Indépendamment de leur rôle de protection des postes contre les attaques nocturnes, les projecteurs ont rempli pendant la guerre d'autres missions tactiques : liaisons par signaux lumineux avec les avions belges qui patrouillent au-dessus du front ou avec les observateurs des ballons captifs, assistance à l'artillerie.
Dans ce dernier cas, les équipages surveillaient le départ des coups de canons. Aussitôt qu'à l'arrière avaient jailli les quatre flammes de la salve, le coup de pinceau d'un projecteur de 30 cm était lancé sur l'objectif. Dès que la fumée des éclatements était venue s'insérer dans le halo lumineux, le projecteur était occulté. Le tout ne durait que quelques secondes, juste le temps nécessaire aux observateurs d'artillerie pour apercevoir le point de chute des obus.
Les projecteurs de 60 cm, servaient à la défense de nuit des cantonnements contre les bombardements par avions.
En 1916, fut créée une Compagnie de Projecteurs d'Armée à 6 appareils de 90, plus des projecteurs dits fixes de même calibre, ne se déplaçant que moyennant chargement sur camion. Un embryon de défense aérienne fut organisé au moyen de ces divers éléments et rendit de bons services en forçant les appareils ennemis à voler haut, au détriment de l'efficacité de leur action.
Participation à un tir contre la pièce allemande de LEUGENBOOM
En 1917, l'ennemi installa dans le secret un canon de 380 mm à longue portée dans le petit bois au LEUGENBOOM. La pièce, placée sous un blindage cuirassé, était flanquée d'énormes abris bétonnés. En batterie à 13 Km en arrière des lignes, elle tirait sur DUNKERQUE, à une distance de 44 Km, des obus pesant 750 kg. A la distance où elle se trouvait du front, il était difficile de la contrebattre, d'autant plus qu'elle n'aurait été vulnérable qu'à un coup de plein fouet de l'artillerie lourde de campagne.
L'armée belge manquant du matériel à grande puissance nécessaire, l'armée française envoya sur le front belge une batterie de 305 mm sur rail qui vint prendre position près de WULVERINGHEM, à 26 Km de la pièce du LEUGENBOOM.
L'observation fut confiée à l'aviation belge, qui fournit un avion d'observation, gardé par quatre avions de chasse. Cet avion était muni de TSF; à cette époque, un avion pouvait seulement émettre mais non recevoir. Or, pour ces tirs spéciaux, il était nécessaire que le commandant de batterie pût envoyer ses instructions à l'avion observateur. On décida donc de réaliser cette liaison par signaux optiques puissants et une auto projecteur de 90 cm fut affecté à cette mission.
Le projecteur, bien dissimulé aux vues de l'ennemi, fut installé à LAMPERNISSE, tout contre les ruines de l'église et l'auto génératrice à 150 m de là. Deux lignes téléphoniques reliaient l'équipage l'une au commandant de la batterie française et l'autre au poste de TSF du secteur qui recevait les communications de l'observateur.
Il devint vite évident que, à la distance de 26 Km à laquelle on tirait, l'ellipse de dispersion était trop grande et qu'il faudrait un coup de chance pour atteindre le but fort petit que représentait la pièce ennemie.
D'ailleurs, après une heure de tir, les Allemands émirent des écrans de fumée qui rendirent impossible l'observation et cela pendant tous les jours où l'on essaya d'atteindre l'objectif.
Le projecteur eut, pendant ces tirs, à communiquer de nombreux messages à l'aviateur et ne fut pas troublé par l'ennemi qui ne s'était pas rendu compte de sa présence.
Quant à la grosse pièce allemande, on dut finalement renoncer à la contrebattre et elle continua jusqu'à la fin de la guerre ses tirs destructeurs. En 1918, elle continua à tirer jusqu'à la fin et fut prise d'assaut par l'infanterie. L'ennemi avait tenté en dernière minute de la faire sauter mais sans résultat et elle tomba intacte dans les mains de nos soldats.
L'offensive de septembre 1918
Aux Projecteurs échut l'honneur de donner, par signaux lumineux sur l'écran des nuages, le signal de l'heure H du déclenchement de l'orage de l'artillerie bombardant de toutes ses pièces les lignes allemandes.
Réorganisation après l'armistice
L'expérience de la guerre ayant démontré que de nombreux progrès étaient à faire pour augmenter l'efficacité des projecteurs dans la recherche des avions ennemis, en y jumelant du matériel acoustique, le service technique des Projecteurs, installé à Anvers, continua l'étude du problème.
C'est ainsi qu'on aboutit à la commande passée en Italie, en 1920, de puissants projecteurs de 1,50 m, avec des lampes à arcs de 300 ampères.
Ce matériel ne fut livré qu'après la reprise des missions des Projecteurs du Génie par le Régiment d'Artillerie de Défense Terrestre contre Avions, auquel furent rattachées, en 1921, les unités de projecteurs.
Mais l'histoire de la DTCA, est une autre Histoire !
Signalons que le Monument aux Morts des Projecteurs du Génie, oeuvre de Paulis, érigé dans la cour d'honneur de la caserne Sainte-Anne à Laeken, a été inauguré le dimanche 29 mai 1933 par SM le Roi Albert. Il porte les noms de 49 Morts pendant la Guerre 14-18 et 5 noms d'Anciens morts en 40-45.
Source
Notice historique éditée à l'occasion du XXVe anniversaire de la Fraternelle des Projecteurs du Génie 1914-1918 (fondée en 1929).
Nous présentons fréquemment des photos que nous remettent des membres ou des sympathisants et qui sont soigneusement conservées dans nos archives.
Dans la série "BAIWIR", nous en avons choisi quelques-unes nous montrant des projecteurs de champ de bataille en 14-18. Elles n'ont pas toutes été sous-titrées ni datées par leur auteur mais, à la lecture de l'article "Les Projecteurs du Génie en 1914-1918", ci-après, le matériel pourra aisément être identifié.
La seule photo qui ne soit pas de la collection "Baiwir" nous montre le quai de l'Escaut devant le STEEN à ANVERS, lors de la retraite, début octobre 1914. Ces lieux ont vu un million de Belges non combattants traverser le fleuve pour gagner la Hollande ou prendre la voie de mer pour chercher refuge soit en Angleterre, soit en France (voir article)
Projecteur de 30 en batterie – 1915
Camion Kelly - Chauffeur
Van de Zande et Le Maire se rendant aux avant-postes avec le projecteur de 15 cm
Le 13.06.1917 – 18 Hr
Auto Projecteur – Avril 1916
Photos
Huivelriguenne
Ne cherchez pas l'anomalie ! Il s'agit bien d'un homme des "Projecteurs", comme sa tenue ne l'indique pas
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La citadelle de Liège - photos

La Citadelle de Liège appartient au passé. Elle fut démolie entre 1967 et 1973 pour faire place à l'hôpital du C.P.A.S., en remplacement de l'hôpital de Bavière, voué lui-même à la démolition.
Voici deux photos aériennes assez rare de cet ancien quartier militaire
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